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Analysis file Dossier : Résistances civiles de masse

Jean Marichez, Grenoble, July 2006

Les clés de la réussite des résistances civiles

Dans quelles situations et à quelles conditions les stratégies civiles sont elles envisageables ? Les sources du pouvoir, talons d’Achille de l’adversaire. Les stratégies. Le véritable mécanisme qui permet de vaincre sans armes. Que faire aujourd’hui pour progresser ?

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I. Les conditions de la réussite

Question importante pour les stratèges : Y a-t-il des situations de conflit plus favorables à ces formes de lutte ? Oui, sous six conditions la résistance a les meilleures chances de triompher.

Si elles ne sont pas toutes remplies, d’autres stratégies sont peut-être mieux adaptées.

Pour éviter une guerre et résoudre un grand conflit par ces stratégies civiles, il y a d’abord quatre conditions nécessaires :

  • 1/ La cause à défendre est indiscutable et largement reconnue (ex. purification ethnique), même soumise à l’épreuve de la durée elle ne risque pas d’être contestée.

  • 2/ La situation est grave (ex. sauver d’un massacre) au point que de nombreux citoyens sont prêts à risquer leur vie pour cette cause.

  • 3/ Le problème est de portée nationale. Ce n’est pas un problème sectoriel ou corporatiste. Tout le pays est concerné.

  • 4/ La population est majoritairement favorable pour s’engager dans la lutte.

Et les deux dernières conditions sont très souhaitables :

  • 5/ La mobilisation générale des civils et de tous les groupes et organismes du pays est confirmée par un pouvoir légitime ou, à défaut, par une autorité largement reconnue. Elle est assortie de consignes d’actions claires et délimitées.

  • 6/ La nation s’est préparée à l’avance ou, pour le moins, dispose de compétences.

Les situations qui rassemblent toutes ces conditions n’ont rien d’exceptionnel, elles sont courantes dans le cas d’une défense militaire. Elles sont typiques d’un grand nombre de guerres, de l’agression d’un pays par un autre (ou par un tyran).

Ce sont les bases de la réussite.

Si l’une d’elles n’est pas remplie, il y a danger à se lancer. C’est rédhibitoire pour les quatre premières, c’est important pour les deux dernières.

Noter que les résistances VIOLENTES sont souvent minoritaires et ne mènent à rien sinon

à d’autres violences. Les résistances NON VIOLENTES minoritaires ne sont pas concernées par ce dossier sur les résistances civiles.

II. Les sources du pouvoir

Une autre question que se pose le stratège avant de s’engager dans une résistance sans armes est de savoir s’il existe un talon d’Achille chez l’adversaire. Quelles sont les clés de son pouvoir ? Quelles sont donc en général les sources d’un pouvoir ?

Le pouvoir ne vient pas du dirigeant lui-même, il ne lui est pas intrinsèque. Il vient d’éléments qui lui sont fournis par ses sujets ou qui sont acceptés par les sujets :

  • L’autorité et la légitimité qui confère le pouvoir officiel. Elle est forte par exemple si la constitution ou la tradition est respectée, si elle est largement reconnue.

  • L’adhésion ou la reconnaissance, qui confère le pouvoir réel. Elle est forte si le nombre de personnes qui acceptent les décisions du pouvoir est élevé, si l’opinion lui est favorable.

  • Le degré de coopération, qui permet la pratique du pouvoir. C’est le nombre de personnes et d’organisations qui obéissent, coopèrent et font le travail : les corps de l’État, mais aussi les organismes civils qui coopèrent, leur qualité, leur étendue et leur autorité.

  • Le degré de compétence car le pouvoir dépend des compétences, des connaissances et du savoir faire de ses collaborateurs, ministres et organismes de toutes sortes.

  • Les facteurs psychologiques et idéologiques, les émotions et les croyances qui sont nombreux, par exemple l’habitude d’obéir, la foi dans une mission, dans une promesse, etc.

  • Les moyens matériels, financiers, la maîtrise directe ou indirecte des transports, de la communication, de la justice…

  • Les sanctions, plus exactement la capacité d’exercer des sanctions, la nature et l’étendue des formes de répression contre des sujets. En font partie la puissance des forces armées et policières, et surtout leur disponibilité, leurs moyens, leur état d’esprit, leur volonté, etc.

Pour peu que l’on examine de près ces sources du pouvoir des gouvernants, l’on remarque qu’elles dépendent beaucoup, sinon entièrement, de l’obéissance et de la coopération des gouvernés.

Si ceux-ci refusent tel ou tel élément de pouvoir (ex. preuve d’un trucage des urnes, blocage des transports, grève des percepteurs, sécession de généraux, …) le pouvoir se trouve ébranlé et peut même complètement disparaître.

La recherche des clés d’un pouvoir et de ses talons d’Achille est donc centrée sur les éléments qui ont leur source dans la population et dans ce tissu d’organismes de la société civile où se trouvent décentralisés des éléments du pouvoir réel (médias, entreprises, syndicats, Églises, partis, associations…). La défiance de l’un de ces lieux de pouvoir pèse lourd dans cette entreprise d’épuisement du pouvoir. L’étude de ces lieux est importante.

III. Les stratégies

Questions déterminantes pour le stratège avant de s’engager dans une résistance civile de masse : Y a-t-il un objectif et existe-t-il une stratégie capable de mettre sur une voie de résolution du conflit ? Quelles sont les stratégies disponibles dans le registre civil ? Comment choisir l’objectif ?

Les stratégies civiles s’inspirent des approches classiques et militaires. Tantôt elles évoquent celle de l’anguille insaisissable, tantôt celle du banc de sardines innombrables ou même du caméléon… La force vient ici de la population et plus précisément de sa multitude, qui est partout, voit tout, a toutes les compétences et toutes les idées, sans qui rien ne peut se faire, et qui peut agir partout, notamment par des petites actions discrètes.

L’unité stratégique est capitale et nécessite pour réussir une préparation importante faite de réflexion et d’organisation méticuleuse. C’est le planning stratégique. Il commence par l’évaluation prudente de la situation, le repérage des points faibles et forts de l’adversaire, les points d’appui de son pouvoir, la détermination claire des enjeux et la sélection d’objectifs accessibles en fonction des faiblesses de l’adversaire. Il définit avec précision une stratégie générale et des stratégies particulières qui sont entièrement soumises à la stratégie générale. La ligne non violente fait partie de la stratégie générale car elle ne souffre pas de demi-mesure. L’ensemble comporte des étapes, des moyens, des préparatifs, des formations, etc. Voici quelques-unes des stratégies particulières les plus fréquentes.

  • 1/ Stratégie anti-pouvoirs : Comme expliqué au paragraphe précédent, il s’agit d’anéantir les sources les plus fragiles du pouvoir. C’est la stratégie de base, qui éclaire les suivantes.

  • 2/ Stratégie anti-objectifs : Elle consiste à empêcher l’agresseur d’atteindre ses objectifs ou de faire en sorte que le coût nécessaire pour les atteindre soit plus élevé que le bénéfice attendu. S’il veut s’emparer de la puissance industrielle, cela peut lui demander des efforts disproportionnés : ralentir le travail, créer des pannes, des erreurs comptables ou informatiques… S’il veut imposer un islamisme intolérant, les refus de porter le voile sont lourds de symbole et d’effets concrets lorsque beaucoup de femmes l’appliquent. S’il veut le territoire, il est possible de lui faire regretter cette acquisition par d’énormes problèmes d’obéissance au point de l’obliger à mettre un soldat derrière chaque personne, etc.

  • 3/ Stratégie anti-collaborateurs : Il s’agit de rendre toute collaboration inintéressante par dissuasion et sanction. L’attaquant, qui ne peut se passer de l’aide des collaborateurs, s’en trouve très affaibli. Si un pouvoir collaborateur est mis en place, il est renié par la plus grande partie du pays, ses nouvelles lois ne sont pas appliquées. Les civils tentés de collaborer avec l’ennemi sont rejetés par tous. Leurs relations de travail, leurs voisins, l’administration, le fisc… leur rendent la vie impossible : leur seule issue est de ne plus coopérer. Cela nécessite des spécialistes formés, des règles et de la concertation au sein des organismes de la société civile car c’est un sujet difficile mais inévitable. Il se prépare en temps de paix.

  • 4/ Stratégie constructive : Elle consiste à mettre en place des éléments positifs de solution du conflit en même temps qu’on mène le combat contre l’agresseur. Il peut s’agir de programmes de formation, de nouvelles lois ou structures, de la mise en place d’un gouvernement en exil, d’une administration, de la suppression de ce qui attise le conflit ou en est la cause… Sans ces programmes, la lutte resterait enfermée dans ses refus et ses négations, elle aurait du mal à donner l’image positive indispensable à sa réussite. Elle permet aussi à ceux qui ont des difficultés d’insertion dans la lutte de se mobiliser dans l’œuvre commune. Il s’agit de construire la paix, d’en montrer la voie et l’exemple, ce qui est indispensable pour gagner, pour entretenir la volonté de la population, se rallier une partie des adversaires et construire les bases de l’avenir.

  • 5/ Stratégie non violente : La pratique de la lutte non violente est plus qu’une éthique, elle est un outil d’une grande efficacité. Elle est une condition préalable pour faire évoluer à son avantage le rapport de forces. D’abord elle permet de rompre la spirale de la violence et d’éviter le pire, de rester centré en permanence sur l’objet du conflit, d’éviter le terrain où l’adversaire est le plus fort, de le placer sur le terrain où il est faible, d’obtenir le soutien de l’opinion internationale et parfois des troupes et médias de l’adversaire, de dépenser moins, de pouvoir développer de véritables stratégies… Cette méthode requiert des techniques et un professionnalisme, bien développés aujourd’hui. Le maintien absolu de cette discipline face à la répression n’est pas un acte de naïveté moralisatrice. Pour la respecter, la dynamique des groupes de la société civile représente un appui crucial qui a fait ses preuves.

  • 6/ Stratégie de communication : Plus encore que dans les guerres classiques où elle a un caractère majeur : elle est essentielle parce que l’acteur est le peuple, sa lassitude et sa résolution sont déterminantes. Elle vise à renforcer la volonté et l’unité d’action de l’agressé et à réduire celles de l’agresseur. Grâce à des médias dévoués, courageux, évolutifs au fur et à mesure que l’adversaire les empêche de fonctionner et des axes de communication bien coordonnés, il faut sans cesse donner des informations aux résistants, les motiver, démonter la propagande ennemie, ébranler la loyauté des troupes de l’adversaire, informer la population adverse, informer l’opinion internationale, clarifier en permanence les objectifs, les stratégies et les moyens, etc. Ces plans permettent in fine l’effet de « dislocation » dans lequel l’adversaire acquiert la conviction d’être pris au piège.

  • 7/ D’autres stratégies aussi nécessaires peuvent être ajoutées à partir de l’analyse des points faibles, par exemple : assurer la survie de la population, réduire ses dépendances, accroître celles de l’adversaire, augmenter les coûts de l’agresseur, obtenir le soutien de médias nouveaux, de l’ONU, de pays étrangers, fonder une nouvelle légitimité, etc.

Il faut hiérarchiser tout cela en fonction de la situation car, dans la pratique, les directives sont parfois en conflit et des choix déchirants sont nécessaires. On peut aussi fixer des phases stratégiques : par exemple un premier temps pour la prise de conscience par la population agressée de sa capacité de résistance et donc de son pouvoir, un second temps pour la réduction du pouvoir de l’adversaire et une période finale pour sa démoralisation.

Les objectifs de la lutte sont alors définitivement confirmés ou précisés car ils doivent dépendre des possibilités stratégiques.

  •  

    • Ils sont réalistes, c’est à dire possibles à atteindre en fonction de l’horizon stratégique.

    • Ils permettent d’atteindre un premier but qui, même s’il n’est pas suffisant, mettra au moins sur une bonne voie la résolution du conflit (ex. négocier en position plus forte).

    • Ils permettent de viser gagnant, contrairement à certaines résistances qui ne sont pas sûres de gagner tant leur objectif est puriste.

Ici, le peuple résistant, voyant la possibilité d’atteindre l’objectif, pourra être déterminé et tenir le cap malgré les difficultés. Ces précautions permettent d’envisager la paix au bout de la lutte. Celle-ci, on va le voir maintenant, n’est pas de tout repos.

IV. Le mécanisme permettant aux faibles de vaincre le fort

Il importe de bien comprendre les mécanismes qui permettent de vaincre des forces militaires puissantes et organisées malgré la répression.

Le début des résistances civiles sans armes n’est pas provoqué, il se déclenche souvent de lui-même lorsqu’une population se trouve acculée dans l’inacceptable, coincée entre l’oppression et la guerre. Suivent alors quelques phases clés plus ou moins simultanées :

  • Un fait déclencheur qui joue le rôle de la goutte d’eau qui fait déborder le vase (élections truquées, assassinat, invasion étrangère…) ;

  • Ce fait est parfois utilisé par les organisateurs qui se sont préparés à l’avance ;

  • Une première action largement suivie au cours de laquelle la population prend conscience de ses possibilités et de sa détermination collective ;

  • L’appui de personnalités et d’organismes reconnus ;

  • La concertation au sein des groupes de vie (entreprises, quartiers, immeubles, associations, syndicats…) qui permet à chacun de mieux comprendre son rôle et son action. Tous les groupes qui existent dans la société prennent dès lors une place essentielle.

On entre alors au cœur du mécanisme avec la phase d’attaque des sources du pouvoir par des actions ciblées. Ce pouvoir ne pouvant admettre sa réduction ou sa disparition, réagit nécessairement par la violence. Si, face à cela, lui est opposée l’attitude non violente et la détermination d’une grande quantité de personnes représentant à l’évidence la majorité de la population, il doit encore augmenter sa répression. Il se trouve pris dans un cercle vicieux qui renforce le lien et la détermination des résistants, fragilise ses troupes et renforce la position internationale des résistants. Ceux-ci peuvent alors affermir leur pression et briser les dernières ressources du pouvoir dans une phase ultime de démoralisation. Dans ce jiu-jitsu politique les puissants se cassent le nez si la résistance est intelligente et surtout bien menée.

Mais le chemin est semé d’embûches : provocateurs infiltrés qu’il faut savoir contrer à temps, propagande mensongère qui nécessite des contre-attaques, rupture de moyens de communication à contourner par d’autres, etc. La parade à l’arrestation des chefs de la résistance doit être préparée, non seulement par des remplaçants mais par la délégation de pouvoirs au sein des innombrables organismes de la société.

La peur des résistants devant la violence est un point crucial de la lutte. Mais l’histoire montre que massivement ils ont souvent réussi à la dépasser (Pologne 1980, Manille 1986…). Cela s’explique par la valeur de la cause, mais aussi par la solidarité dans la lutte qui prend corps dans les groupes de concertation et permet ce dépassement étonnant. De plus, certains enseignent des techniques pour dominer leur peur.

Si l’on ajoute tous les phénomènes cités ci-dessus (jiu-jitsu contre le pouvoir, gestion de la peur et force de la non-violence en masse), si l’on s’imprègne du fait que le peuple est exacerbé et joue son va-tout, qu’il est soutenu dans les structures de la société, qu’il sait que l’effort est national, que la majorité est de son côté, que certains donnent leur vie pour cette cause, qu’à l’étranger il n’est pas oublié et reçoit des appuis fermes accompagnés d’actes concrets, l’on comprend la détermination mise en œuvre, la puissance du mécanisme.

A tous les niveaux de la lutte, l’importance de tous ces organismes de la société civile qui entretiennent au quotidien une véritable dynamique est manifeste. L’on voit aussi la force des sociétés qui possèdent des structures civiles largement développées.

V. La guerre non violente

Cette expression qui assemble deux mots contradictoires n’est utilisée que pour faire comprendre les caractéristiques étonnantes de ces résistances.

Une stratégie civile, qui se donne toutes les chances de réussir, conduit à une véritable guerre exercée sans armes, par des actions civiles. En effet, comme pour la guerre, elle suppose une préparation et une véritable organisation nationale (prise en charge par l’État si possible), de la recherche, du renseignement, des compétences, la formation des leaders, des processus de communication, des moyens matériels, des technologies nouvelles, etc. Comme pour la guerre, ce combat nécessite des objectifs, des stratégies, une organisation, des soutiens étrangers, de la logistique, une mobilisation générale.

Comme la guerre elle mobilise toutes les forces vives d’une nation, elle est une épreuve de force dans laquelle les adversaires jettent toute leur puissance. Les résistants subissent une répression sévère. Elles ont des morts, des blessés et des torturés. Elles sont dépourvues d’armes mais leur nombre et leur présence incontournable dans tous les rouages de la société font le poids. Elles évitent de se faire prendre par des petites actions nombreuses et insidieuses : tactique de la fourmilière face à celle de l’éléphant, de l’anguille insaisissable. Elles sont en lutte organisée dans les structures de la société civile contre les collaborateurs, contre la désinformation et le mensonge dans des ambiances parfois délétères. Grâce à des dispositifs de concertation et de décentralisation, elles reçoivent quand même des consignes claires. Leur lutte est intense et passe par des stades cruciaux. Seule différence par rapport à la guerre, elles excluent

tout usage de la violence ce qui ne diminue ni l’engagement humain ni l’usage de techniques aujourd’hui assez bien au point. Le professionnalisme est de rigueur.

Comme en guerre, les acteurs jouent gagnant et non pas seulement résistant, ce qui oriente toute la stratégie et conduit à un combat déterminé, un engagement si total que certains y perdent la vie.

De même, à la fin des opérations, l’adversaire doit changer de stratégie comme l’histoire l’a montré : selon les cas, parfois il acceptait complètement les objectifs de la résistance, soit qu’il les avait compris soit qu’il y était contraint, parfois il acceptait un compromis, parfois il se désintégrait complètement parce qu’il n’avait plus aucun pouvoir.

Toutes les caractéristiques de la guerre sont bien présentes. Si on ne les a pas clairement présentes à l’esprit, on ne peut pas comprendre ces stratégies et l’on s’expose à de mauvaises appréciations.

VI. Conclusions

Que peut-on faire aujourd’hui pour progresser dans cette voie de résolution des conflits ?

Les stratégies civiles sont aussi difficiles et incertaines que les stratégies militaires. Elles demandent beaucoup d’intelligence mais elles ne disposent pas de pôle de recherche et de compétence. On a tendance à sous-évaluer le niveau de matière grise nécessaire à cette stratégie, à ne pas lui attacher l’importance qu’elle mérite et à oublier de la préparer. Beaucoup de stratèges ignorent aussi la qualité et l’étendue des recherches déjà effectuées, comme ils sous-estiment l’étendue des recherches à engager.

D’un autre côté, il n’y a plus de doute, les résistances ont fait leurs preuves sur le terrain, et ont retenu l’attention d’un grand nombre de militaires, stratèges, chercheurs, prix Nobel… Tous recommandent de persévérer dans cette voie notamment par la compétence. Les Américains s’y sont engagés à fond pour la Serbie, la Géorgie, l’Ukraine et la Kirghizie. Des conflits ont lieu hors de nos frontières et des résistances civiles y sont fréquentes. Les besoins sont nombreux (Biélorussie, Palestine, et toute l’Afrique…). Nous ne sommes pas en mesure de les aider. Pour plusieurs, le manque de professionnalisme est patent. Il manque dans le monde un pôle de compétence ès résistances civiles prêt à les aider quand, prenant un caractère de masse, elles deviennent une véritable expression de la démocratie et méritent alors de réussir.

Imaginons maintenant que, dans chacune de nos unités de recherche stratégique, géopolitique, diplomatique.., nous ayons développé de véritables compétences en matière de stratégies civiles, que les études aient intégré cette dimension supplémentaire qui permet de bien interpréter les résistances en cours et de percevoir les potentiels de résistances futures dans les conflits en phase de croissance. Ces compétences seraient vite connues et consultées par les peuples en conflit ou par leur gouvernement.

Notre diplomatie gagnerait en profondeur de vue et surtout en propositions d’action pour la paix, aussi bien pour nous que pour les peuples en conflit. Notre défense nationale y gagnerait en compétence et élargirait son offre stratégique, ce qui pourrait se révéler capital dans les conflits éminemment évolutifs auxquels nous aurons à faire face et dans lesquels les populations sont de plus en plus impliquées.

Telle est donc notre double recommandation :

1 - Développer au plus tôt cette dimension stratégique dans les études, recherches, publications, et débats sur les conflits en cours et en développement.

2 - Créer des compétences de haut niveau à plusieurs échelons de notre défense.

Elle s’adresse d’abord aux responsables politiques en charge de notre défense mais aussi à tous ceux qui réfléchissent à la résolution des grands conflits, et aux unités de recherche.