Fiche de document Dossier : L’Art de la Paix

Anne Ollivier, Grenoble, France, février 2006

L’art de la Paix : Revue de la Psychologie de la Motivation, n°28

Revue dirigée par Paul Diel, réunissant une série d’articles écris aussi bien par le philosophe Edgar Morin, l’homme politique Michel Rocard, le psychosociologue Jacques Salomé ou encore Pierre Calame, directeur de la FPH et Richard Pétris, directeur de l’Ecole de la paix. Chaque auteur essaye d’apporter sa pierre à l’édifice.

Mots clefs : | | | |

Réf. : L’Art de la Paix, Revue de psychologie de la Motivation, Cercle d’Etudes Paul Diel, deuxième semestre 1999, n°28. 149 pages.

Langues : français

Type de document : 

La paix n’est pas seulement un problème international comme le montre les différentes disciplines et objets d’études présents dans cet ouvrage. La paix peut aussi bien être abordée au sein de l’individu, de la famille ou encore du couple. Il s’agit d’un ensemble de réflexions théoriques et pratiques sur les manières de mettre en place un art et une culture de la paix.

Commençons par évoquer le choix du titre qui n’a rien d’anodin. En effet, la revue aurait du s’appeler « Guerre et Paix » . Mais cette dichotomie est dénoncée par François Géré: « La paix ne saurait se définir selon une symétrie des états. La paix devrait apparaître comme la normalité et être capable de démontrer que la guerre constitue un accident, une perturbation ou un instrument au service de la politique. Toutes les formules qui favorisent ce couplage antinomique constituent autant de pièges pour l’établissement d’une définition de la paix. »

Comme l’énonce Armen Tarpinian, ce numéro a pour but de créer en réponse à la polémologie (étude des conflits) une « praxologie » qui se fonderait sur différentes disciplines, à la fois théories et pratiques de la paix. D’où la grande diversité des articles qui se réfèrent aussi bien à l’observation du monde intérieur qu’extérieur.

Au cœur des préoccupations de Paul Diel, il n’est pas surprenant que la psychologie tienne une place importante dans cet ouvrage. Ainsi, certains auteurs mettent l’accent sur le fait que la violence naît en chacun de nous et que la gestion des conflits s’apprend dès l’enfance au sein de la famille. Jacques Salomé montre que concernant les motifs des conflits, il y a des similitudes entre le niveau familial et étatique. De même, si au sein de la famille, c’est l’amour qui est le moteur de la réconciliation, entre Etats, il y a un besoin d’entente entre les peuples. Marie-Françoise Bonicel, quant à elle, compare la transmission de la violence au sein de la famille avec la transmission transgénérationnelle liée aux génocides. Comment sortir de la « victimisation » et se reconstruire après de tels évènements ?

La question des conflits dans le couple ainsi que celle des fausses motivations (Paul Diel) sont également abordées.

L’introspection intérieure et l’étude psychologique permettent d’évoquer aussi bien les fondements du fanatisme ainsi que ceux de la négociation. Concernant le fanatisme, Hamid Amir, déconstruit les différents facteurs explicatifs de l’intégrisme islamique.

D’un point de vue philosophique, Robert Mishrahi montre que les guerres ne sont pas nécessaires mais contingentes et volontaires. On peut donc s’y opposer ! Ainsi, il cherche à démystifier la guerre en montrant qu’elle repose sur une illusion.

Dernier volet du côté théorique, André Levesque s’interroge sur l’existence de valeurs communes à l’humanité et le rôle de celles-ci au sein de nouvelles Chartes, comme la Charte de la Terre, également évoquée par Pierre Calame. Ce dernier reconnaît qu’il faut faire évoluer notre système de valeurs en prenant notamment en compte les questions d’environnement et de mondialisation.

Mais construire la paix, c’est aussi mettre en place des actions concrètes. Edgar Morin invite le lecteur à réfléchir sur la nécessité de créer une « culture et un enseignement de la compréhension » . Cette compréhension doit se faire au niveau mondial. Michel Rocard, fort de son expérience de Premier Ministre, revient sur la question de la « revendication identitaire » et de la violence politique. Pour cela, il évoque les exemples de la Corse et de la Nouvelle Calédonie. Après avoir montré les étapes et les détonateurs de cette violence ; il évoque les manières d’en sortir, en mettant particulièrement l’accent sur la médiation, et le dialogue. Un autre élément est également essentiel : la prévention des conflits qui doit intervenir en amont aux premiers signes de violence.

Une autre expérience de terrain fait écho à ce témoignage, celle de la Helsinki Citizen’s Assembly en Ex-Yougoslavie. Bernard Dréano montre l’importance des actions de ce genre d’organisation de la société civile pour construire la paix et prévenir les conflits : « Les hommes et les femmes de HCA n’ont pas plus de poids ou de visibilité dans le paysage que des abeilles, ce sont pourtant elles qui assurent la pollinisation des fleurs. »

La culture de la paix est également « pensée » , c’est le cas de l’Ecole de la paix, fondée par Richard Pétris à Grenoble. Il adopte comme nouvel adage « Si tu veux la paix, prépare la paix » . Son projet vise à contribuer « aux changements de mentalité et de comportement qui peuvent favoriser le glissement d’une culture de guerre vers une culture de paix » . La paix, comme le fait aussi remarquer François Géré, reste à faire. « Le compromis est, avec le dialogue, à la base de la démarche de négociation et de la culture de paix. » De plus, selon R. Pétris, il n’y a pas de paix sans développement et solidarité.

Enfin, François Géré, évoque les stratégies nécessaires à la mise en place de la paix. Il illustre son propos avec l’intervention de l’OTAN au Kosovo. Selon lui, la situation actuelle n’est pas un état de paix mais un entre deux guerres. Il s’agit donc de mettre en place une stratégie de paix fondée sur un « réalisme pacifique» (notamment fondé sur le pragmatisme et le passage de l’affrontement à la coopération).

Commentaire

Ce document foisonnant d’idées, de réflexions et d’expériences de terrain, est un bon moyen de se familiariser avec des disciplines diverses, qui apportent toutes leur contribution à la mise en place d’une culture de la paix.