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Cyril Musila, La Haye, 1999

A propos de la participation des Chrétiens au génocide. Tous n’ont pas été des bourreaux

Après le génocide rwandais, l’Église catholique dans son ensemble a été mise en question. Le débat sur la participation des chrétiens rwandais dans le génocide est souvent formulé à travers cette question : comment des haines et des massacres ont-ils pu éclater dans un pays où le christianisme semblait si bien enraciné ?

Comment des haines et des massacres ont-ils pu éclater dans un pays où le christianisme semblait si bien enraciné ? Face à cette interrogation, l’Église rwandaise, à travers la hiérarchie et ses fidèles, s’est remise en question. Le scandale des églises et des lieux de culte transformés en abattoirs par des massacreurs chrétiens a mené à remettre en question les méthodes d’évangélisation et l’œuvre missionnaire de presque tout un siècle.

I. La fragilité du christianisme rwandais

Si des chrétiens ont pris une part active dans le génocide, cela révèle la fragilité du christianisme rwandais, puissant en apparence par les moyens matériels qu’il a apportés dans ce pays, mais incapable de transformer les mentalités en profondeur. Ce sont en effet ces églises chrétiennes qui ont bâti les premières écoles, formé l’élite du pays, tenu les premiers dispensaires et centres de santé, et leur apport au développement social représentait une forte contribution.

Mais avec toutes ces œuvres, l’Église du Rwanda s’était comportée comme une puissance politique, économique et sociale.

Les voies traditionnelles que l’Église avait choisies, notamment les œuvres de développement et actions caritatives, les écoles et les dispensaires, n’ont pas été perçues comme signe d’un message de libération intérieure et d’épanouissement spirituel. Dans les luttes fratricides pour les pouvoirs et les possessions, les fonctions ecclésiastiques ont été perçues comme des sphères de pouvoir à arracher au même titre que les fonctions administratives.

L’autre mode de présence privilégié par les autorités chrétiennes était le terrain religieux, le terrain sacré. On avait trop vite jugé chrétien le fait que les fidèles venaient nombreux à la messe, le fait qu’ils aimaient le culte et recevaient les sacrements. La pratique révélait certes la vitalité et le dynamisme de l’Église, mais un discernement était nécessaire entre évangéliser et rendre religieux, car la rencontre avec le Christ doit purifier la religiosité. Les manifestations religieuses et cultuelles, en tant que modes de présence de l’Église étaient alors à repenser.

II. Des critiques très sévères contre l’Eglise

Mais il y a des signes d’espoir pour l’avenir. A côté de ce tableau sombre sur l’Église, les communautés chrétiennes signalent la présence des étincelles qui brillent encore. Ces lueurs d’espoir sur lesquelles se fondent aujourd’hui l’élan de réconciliation sont des actes posés par quelques chrétiens pendant le génocide. Alors que la tendance générale aujourd’hui est de diaboliser en bloc, on note que des Hutu se sont cachés pour ne pas être forcés à commettre des tueries. Certains se sont enfuis, d’autres ont protesté en formant des “cercles de fraternité et d’unité”, des communautés inter-ethniques Tutsi-Hutu pour épargner les Tutsi des génocidaires. Des fraternités de prêtres, par exemple la fraternité Charles Foucauld, les communautés religieuses avaient dépassé les clivages Hutu-Tutsi. Au risque des représailles ou de vengeance, ils prenaient sur eux la responsabilité de cacher des personnes menacées de mort. Ces petits actes d’héroïsme vécus par des inconnus et des anonymes sont nombreux. Il existe dans certaines paroisses une recherche de ces témoins pour les mettre en valeur et corriger l’idée que l’Église a échoué toute sa mission au Rwanda.

Les critiques ont été très sévères contre l’Église et ses œuvres sociales, pourtant importantes dans un pays aussi pauvre. Mais les privilégier au point d’en faire le centre de la vie des églises a détourné des objectifs majeurs. Les prêtres, les évêques, selon ces critiques, se sont transformés en gestionnaires, en hommes d’affaires, s’identifiant parfois au pouvoir et au système décrié.

Devant le désir de connaître la vérité sur ses responsabilités dans le génocide et à cause du poids des massacres, l’Église du Rwanda s’est trouvée impuissante pour reconnaître que tout le monde n’était pas bourreau. Étaient-ce le complexe, la haine ou la vengeance de la société qui ont couvert ces actes de valeur ? Alors qu’aujourd’hui la tendance est de construire la paix, ces exemples sont des valeurs sur lesquelles le Rwanda doit bâtir son avenir. Dans cette perspective d’avenir, l’Église devra mettre en lumière et faire l’éloge de tous ces exemples de bonté, de compassion et de fraternité chrétiennes. Grâce à eux, des cœurs blessés et déchirés pourront retrouver goût à la vie et croire de nouveau en l’homme.