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, Paris, 2005

Argentine, Costa Rica, Cuba : identification commune de défis économiques

Argentine : faire face à une crise extrêmement grave ; trouver des solutions. Costa Rica : centraliser la majorité des pouvoirs au sein de l’Etat afin de permettre à ce dernier d’intervenir directement dans le domaine économique et social du pays. Cuba : nationaliser la plupart des pans de l’économie ; Cuba aux Cubains et non pas aux Américains.

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A l’époque de la dictature argentine, les militaires élaborent un programme économique radicalement différent de celui qui était en vigueur lors du péronisme d’après-guerre : les militaires ont procédé à l’ouverture de l’économie au marché mondial et à la réduction du rôle de l’Etat. En d’autres termes, leur but était d’amener l’Argentine à une nouvelle insertion dans le marché mondial, cette fois dans la voie de l’intégration totale, en abandonnant toute perspective de développement national. C’est ainsi qu’après 45 ans d’une relative autonomie et de la prépondérance du marché interne, le pays passe à une ouverture totale de son économie au marché mondial et à l’application des recettes du FMI !

Mais à la fin de la période militaire (1982-1983), le pays s’enfonçait dans une crise majeure : la forte crise financière et la récession sans précédents ne sont que les parties visibles de la crise du régime économique dans son ensemble.

Lorsque que le gouvernement d’Alfonsín arrive au pouvoir, s’attaquer à la crise économique du pays est une priorité. Alfonsín s’essaiera dans un premier temps aux recettes keynésiennes de relance de l’économie, consistant, notamment, en une reconstruction du marché intérieur au moyen d’une augmentation générale des salaires ; mais les illusions de la relance économique disparaissent brutalement. L’hyperinflation entame une course effrénée (le taux de celle-ci grimpe à 700 % en 1984 pour atteindre 1 200 % en mai 1985 ! ), et c’est le début du « Plan Austral », une tentative supplémentaire destinée à endiguer cette hyperinflation, et qui constitue un alignement sur la politique de réajustement dictée par le FMI et la Banque mondiale. Malgré une courte amélioration de la situation, l’inflation resta importante, atteignant un taux annuel de 80 %. Quant au processus de désindustrialisation, au chômage et à l’endettement à la fois public et privé, ils ne cessèrent guère malgré les promesses d’Alfonsín. Ce dernier ne parvint pas à mettre concrètement en œuvre l’empire démocratique qu’il avait promis, comme gage d’harmonie sociale, de stabilité politique et de bien être économique.

Son incapacité à sortir durablement le pays de la crise économique dans laquelle les militaires l’avaient embourbé, lui fit perdre de sa crédibilité aux yeux d’une population chaque fois plus mécontente.

Au Costa Rica, le modèle économique choisi suite aux événements de 1948, se caractérisa par une importante intervention de l’Etat dans l’économie, une économie davantage concentrée sur son développement national que sur un désir d’ouverture au marché mondial. Contrairement à l’Argentine, cette recette fonctionna puisqu’entre 1950 et 1980, le Costa Rica connut une période de grande croissance économique (le PIB par habitant est passé d’environ 850 dollars en 1950 à 2 032 dollars en 1980) (1).

Il faut toutefois souligner que ce modèle économique ne suffit pas pour que le Costa Rica évite la crise : en 1980-1982, le pays connut une crise économique très grave et la réponse politique à cette crise fut la mise en œuvre d’un nouveau mode de développement basé sur la promotion des exportations, l’ouverture commerciale et la réduction de l’intervention de l’Etat dans le domaine économique. Ce revirement lui permit de se redresser et d’atteindre dix ans plus tard des résultats très satisfaisants (2).

Nous pouvons donc d’ores et déjà constater que si le gouvernement argentin respecta à la lettre les recommandations du FMI, celles-ci ne permirent pas de rattraper les conséquences gravissimes du processus de désindustrialisation et d’ouverture totale de l’économie au marché mondial enclenché par les militaires. En revanche le Costa Rica, qui opta pour un modèle bien moins libéral où l’Etat intervient de manière importante dans le secteur économique, connut des années de gloire auxquelles seule la crise de 1980-82 porta un coup d’arrêt. Et ce n’est qu’à partir de là que le Costa Rica choisit d’ouvrir clairement son économie au marché mondial : plus de quarante ans après le conflit de 1948, son régime démocratique était déjà plus solide qu’en Argentine où le gouvernement a préféré faire rimer démocratie avec libéralisation économique.

Enfin, concernant Cuba, le modèle économique choisi interdit toute équivoque. Fidel Castro nationalise tout, et en particulier tout ce qui appartient aux Américains :

  • les firmes pétrolières (toutes dirigées par des Américains) ;

  • les banques ;

  • les biens institutionnels des Américains dans l’île.

Parallèlement, le Comandante procéda à deux réformes extrêmement importantes : une réforme agraire et une réforme urbaine, l’une destinée à redistribuer les terres des grands propriétaires au profit des petits paysans, l’autre afin de baisser les loyers au profit des locataires.

Avant la chute du modèle communiste, Cuba exportait son sucre et recevait en échange des équipements industriels, ainsi que de la viande en conserve et une grande quantité de produits alimentaires. Puis avec l’effondrement du bloc communiste, Cuba s’enfonça dans une crise majeure, à laquelle Castro répondit en instaurant la fameuse « période spéciale en temps de paix », un programme temporaire, encore en vigueur aujourd’hui. Face à l’impossibilité de survivre avec ce que prévoit et permet le programme, une économie parallèle s’est développée sur l’île, officiellement interdite, mais en fait tolérée par le régime conscient que cela compense une situation de pénurie quotidienne. La crise économique est donc permanente et chaque fois plus inquiétante sur l’île.

Notes :

(1) : J. Vargas-Cullell, L. Rosero-Bixby et M. Selligson, La Cultura política de la democracia en Costa Rica 2004, San José, CCP de la Universidad de Costa Rica, 2005, p.3.

(2) : J. Vargas-Cullell, L. Rosero-Bixby et M. Selligson, op.cit., p.7