Fiche d’expérience Dossier : Bâtir un réseau de citoyens soutenant des initiatives locales de construction de paix.

, Bruxelles, février 2005

Colombie, les enfants votent pour la paix et pour le respect de leur droit

Dans un contexte de crise, des enfants et des jeunes peuvent se mobiliser pour montrer le chemin à suivre aux adultes.

Mots clefs : Respect des droits des enfants | Organisations citoyennes et leaders pour la paix | Résister pacifiquement à la guerre | Colombie

Contexte

Déplacements de population, enrôlements forcés, assassinats, exploitations et très grande pauvreté, maladie… ce qui frappe les adultes en Colombie frappe aussi les enfants et violent leur droit. 90% des victimes des conflits colombiens sont des civils et parmi les trois millions de personnes déplacées pendant une vingtaine d’année, 70% avait moins de 19 ans.

Des jeunes réagissent

Dans les années 90, trois jeunes adolescents se sont mobilisés pour contribuer à défendre la paix et leur droit. Farliz Calle, fille d’ouvrier et présidente du conseil des élèves de son lycée d’Apartadó, avait 17 ans lorsqu’elle rencontra Graça Machel, épouse de Nelson Mandela, qui s’était rendue à Apartadó pour y dénoncer la violence contre les enfants. " Pour la première fois, dira Farliz, les autorités ont demandé aux enfants de réfléchir de manière constructive à ce qui nous arrivait, à la violence, et à ce que nous voulions faire pour y mettre fin « . Aussitôt, des milliers de jeunes de la région ont organisé une exposition sur la paix et, désireux de jouer un rôle actif au sein de leur communauté, les enfants d’Apartadó ont rédigé une déclaration. Un « gouvernement local des enfants » s’est formé puis Farliz a été élue premier « enfant maire » de la région d’Apartadó.

Le vote pour la paix

Par la suite, l’UNICEF a invité les enfants de Colombie à des rencontres pour la paix d’où est né le Mouvement des Enfants pour la Paix. S’appuyant sur la Convention internationale des droits de l’enfant, le Mouvement a organisé à travers tout le pays un vote intitulé « Mon vote en vaut deux… la paix et mes droits !  » Chaque enfant disposait d’un bulletin de vote où figuraient douze droits : le droit à la vie, à l’éducation, à l’amour et à la famille, à l’environnement, à la différence, à une protection spéciale, à ne pas être exploité, à la liberté d’expression, à la protection contre la maltraitance, à être secouru les premiers, à la paix, à la justice. Le jeune électeur (entre 7 et 18 ans) devait choisir lequel lui semblait le moins respecté, lequel était le plus important à ces yeux et il n’avait qu’un seul choix. Près de 3 millions d’enfants et de jeunes ont participé avec sérieux et dignité en trois jours de scrutin à cette opération qui se déroulait dans les écoles, dans les mairies…

Et le résultat a été éloquent : le droit à la vie et le droit à la paix arrivèrent tous les deux très largement en tête avec respectivement 26% et 19,8%. L’ensemble des résultats a été remis à Ernesto Samper, Président de la Colombie à l’époque.

Les suites de l’action

Cette initiative a été comprise par les adultes comme un appel à la mobilisation de tous contre la guerre civile. Une année plus tard, des associations colombiennes regroupées dans le Mandato ciudadano por la paz a organisé une opération similaire pour les adultes où ils ont été plus de 8 millions a voté à leur tour pour la fin de la violence. Plus de 100 000 jeunes ont été actifs aujourd’hui dans le mouvement colombien des enfants pour la paix. Farliz Calle s’est rendue à l’ONU et a invité tous les pays du monde à considérer les enfants non uniquement en tant que victimes de guerre mais en tant qu’artisans de paix. Persuadé que " le processus lancé en Colombie offre une chance de mobiliser les peuples et le monde en une véritable force en faveur de la paix " José Ramos-Horta a proposé la candidature des leaders du mouvement au prix Nobel de la paix 1998

Commentaire

La mobilisation des enfants et des jeunes n’a pas stoppé la violence en Colombie. Par contre elle a aidé à renforcer les mouvements pour la paix dans le pays et elle pourra peut-être favoriser l’émergence de futurs adultes capables de choisir des orientations politiques plus propices à la paix. En tout état de cause, elle donne une leçon aux adultes…

Notes

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