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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Jennyfer Vasquez, Paris, janvier 2005

La méthode du Président Uribe pour la paix en Colombie : répression des groupes hors-la-loi, renforcement de l’autorité politique et monopole de la violence de la part de l’État

Après l’échec des tentatives de négociation avec les FARC du Président Pastrana, le Président Uribe utilise une autre stratégie, celle de la force. Alors que des secteurs de la société critiquent les abus commis par l’armée et les violations des droits de l’homme, la majorité de la population manifeste son soutien au gouvernement en raison de la baisse évidente de la violence et de l’insécurité.

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Comme si le peuple colombien en avait eu assez de tenter de négocier la paix avec les guérilleros, lors des élections de 2002, ils ont élu un président proposant d’arriver à la paix par un autre moyen que la négociation : celui de la force. Le Président Uribe, comme candidat à la présidence, a promis la « main dure » contre la guérilla et le rétablissement de l’autorité du gouvernement (une bonne analyse de l’approche Uribe est présentée dans « Ana Carrigan. “War or Peace?” Institute for Public Affairs, In these Times. September 2, 2002. Lexis Nexis »). M. Uribe était un fort critique des négociations de paix, car il estimait que les guérillas n’étaient pas prêtes à laisser les armes (ceci est bien mis en lumière dans « Jose de Cordoba. “Uphill Battle: Ravaged Colombia Sees Glint of Hope as Killings Fall.” The Wall Street Journal. (Eastern edition). New York, NY: August 10, 2S004»). M. Pastrana a annoncé la fin des négociations de paix en février et les Colombiens ont élu M. Uribe au mois de mai de la même année. Ce dernier, encore aujourd’hui, veut résoudre le problème du conflit armé d’une façon militaire. Dans son article, Mauricio Garcia-Duran décrit le modèle Uribe en disant qu’il retourne au modèle d’agenda limité : « focalizándose en la desmovilización y reinserción de los grupos armados, particularmente los paramilitares.

L’élection du président Uribe fut bien reçue à Washington. La victoire du président Uribe fut regardée comme un mandat des Colombiens pour intensifier le combat contre les FARC. L’ambassadeur américain a rencontré le Président Uribe avant que sa victoire ne soit officielle pour le rassurer du soutien de Washington. Une semaine plus tard, le sous-secrétaire des États-Unis pour l’Amérique latine a rencontré M. Uribe pour discuter plus en détails du renouvellement du Plan Colombia et de la suppression des restrictions de l’usage d’hélicoptères.

Au cours de la première semaine de son mandat, M. Uribe a déclaré un état d’exception donnant ainsi au gouvernement « la possibilité de prendre les mesures jugées nécessaires pour faire face aux attaques des rebelles des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC)». La stratégie de la main forte contre les groupes hors-la-loi a comblé le vide laissé par l’échec du plan de paix Pastrana.

Le Président Uribe a obtenu le renouvellement de la part de l’administration Bush du Plan Colombia en juillet 2003. Mais, contrairement au premier Plan Colombia, celui-ci ne contient pas de restrictions concernant l’aide militaire. L’aide, qui auparavant était destinée uniquement à la lutte contre les drogues peut désormais être utilisée pour la lutte antiterroriste. Le montant de l’aide s’élève alors de 28,9 milliards de dollars de la part du gouvernement américain, dont 500 000 dollars servent à combattre le terrorisme en Colombie : une armée forte est nécessaire pour reprendre le pouvoir dans les territoires où l’État a perdu le contrôle.

Le gouvernement a augmenté les forces de sécurité d’un tiers. Pour financer ce projet, il a levé un impôt concernant les plus riches du pays. De plus, la ministre de la Défense, Martha Lucia Ramirez, a déclaré que quelques 10 000 postes de policiers allaient être créés et que 3 000 soldats seraient également enrôlés. Si le Président Pastrana a entamé un effort de professionnalisation de l’armée ; le Président Uribe s’est beaucoup investi dans ce processus dès le début de son mandat : certains ont commencé à le surnommer même « le superman colombien » (voir The Economist. “Superman Uribe holds back the tide.” 6/7/2003, Vol. 367 Issue 8327, p30, 2p, 1c. Lexis Nexis).

Mais cela aide aussi à remonter le moral du peuple et lui donne un sentiment de sécurité. Le peuple colombien avait besoin de quelqu’un pour renouveler sa confiance dans son gouvernement, et il est très satisfait du Président Uribe. Les sondages de 2004 montraient que plus de 70 % des citoyens le soutenaient. Entre janvier et avril 2003, les meurtres ont baissé de 21 % et les enlèvements de 35 % en comparaison avec la même période de l’année précédente. Entre mai 2003 et mai 2004, les enlèvements ont baissé de 44 % avec 1 737 rapts et les homicides ont baissé de 20 % avec environ 21 000 meurtres en 2003.

L’amélioration de la sécurité est venue permettre la croissance de l’économie. Selon José de Cordoba, dans son article pour le Wall Street Journal « L’an dernier, les investissements du secteur privé ont presque doublé en comparaison avec ceux enregistrés en 2002. Au premier trimestre de cette année les nouveaux investissements directs ont augmenté de 73 % pour atteindre un total de 546 millions de dollars, principalement grâce aux secteurs du pétrole et de l’extraction de minerais. Les économistes prévoient une croissance record de 4 % pour cette année ».

Commentaire

Les détracteurs des nouvelles politiques du Président Uribe sont nombreux. Dans son article pour le New Statesman, Isabel Hilton estime que le nouveau président n’a pas fait autant pour la Colombie que l’on veut croire. Selon I. Hilton, depuis l’arrivée de M. Uribe au pouvoir, le nombre de prisonniers a augmenté de 50 000 à 67 000 en raison d’une vague d’arrestations arbitraires : « wave of arrests that frequently derive from nothing more than the unsupported and anonymous accusation of a paid informer » (voir Isabel Hilton. “Leader with the iron fist and the big heart.” New Statesman. February 23, 2004. Lexis Nexis). Dans son article, elle critique l’usage d’informateurs payés pour dénoncer des terroristes. Cela représente, insiste-t-elle, une partie importante du plan du Président pour la lutte contre les guérillas. Hilton cite également les abus du pouvoir de la part du Président, notamment les arrestations en masse et son désir de donner des pouvoirs spéciaux à l’armée. Ceux qui critiquent les abus du président, notamment les ONG, sont eux-mêmes critiqués. Le président dit : « they were political maneuvers in the service of terrorism ». Hilton écrit que le ministre de la Défense lui a communiqué que 95 % de l’information sur la Colombie au monde extérieur vient des ONG sympathisant avec la guérilla. Parmi les ONG visées : War on Want, Save the Children, Amnesty International, Human Rights Watch et leurs équivalents colombiens. Des ONG internationales et colombiennes accusent le gouvernement Uribe de ne pas prendre en compte le respect des droits humains dans sa stratégie militaire de répression. Ce dernier accuse des ONG internationales et colombiennes de servir de façon indirecte à la justification du discours des FARC et à la légitimation de leurs actions de violence, voire de terreur.