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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Guatemala, décembre 2004

La longue marche de la société civile du Guatemala vers les accords de paix signés en 1996

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Le conflit armé guatémaltèque avait été déclenché en 1960, dans un pays traversé par des profondes inégalités socio-économiques et gouverné par une dictature militaire. À la fin des années 1970, le conflit armé devenait une guerre civile d’une extrême cruauté. Des initiatives de paix ont alors vu le jour. Vers la moitié des années 1980, le contexte international changeait aussi de façon importante. La guerre froide agonisait dans l’ébranlement de l’Union soviétique. Les États-Unis mettaient en œuvre une nouvelle politique internationale pour l’Amérique latine basée non plus sur la lutte anticommuniste, mais cherchant l’exportation du modèle libéral avec ses exigences en termes de démocratie et de respect des droits de l’homme. Les nations de l’Amérique latine ont décidé d’entamer une dynamique de solidarité, un groupe de pays latino-américains ont constitué le groupe CONTADORA avec l’objectif de favoriser la pacification de l’Amérique centrale traversée alors par des conflits armés internes. Les nouvelles autorités politiques de l’Amérique centrale, plus proches des principes démocratiques que de l’État militaire, ont décidé de s’attaquer aux conflits armés qui déchiraient leurs sociétés en mettant en œuvre un processus de démocratisation du pouvoir et de pacification des rapports sociaux appelé « processus d’Esquipulas ».

Le gouvernement du Guatemala, avec à la tête M. Vinicio Cerezo du parti de la démocratie chrétienne, a décidé d’entamer des dialogues avec les dirigeants de la « Union Revolucionaria Nacional Guatemalteca » (URNG) réunissant les différents groupes de guérilla.

La société civile guatémaltèque s’est beaucoup investie dans ce nouveau processus. Ayant trouvé un espace politique d’organisation, d’expression et de participation, la société civile s’engageait de plus en plus dans la lutte pour la justice sociale, pour la démocratisation du pouvoir, pour le respect des droits humains et pour la construction de la paix. Ces quatre éléments constituaient un ensemble cohérent et un projet de nation qui donnait un sens à la société guatémaltèque sortant de la guerre.

Il est important de remarquer le fait que les élites économiques du pays traversaient à l’époque une situation de transition très importante. Grâce à l’essor de l’économie financière ainsi qu’à de nouvelles formes d’économie, l’élite économique s’est partagée en deux tendances. La tendance traditionnelle constituée de la vieille élite très accrochée au système autoritaire en vigueur voulant maintenir la population dans un état de pauvreté économique et de soumission politique. Ensuite la tendance plus moderniste, constituée de jeunes entrepreneurs qui considéraient que des meilleures conditions de vie pour la population ne pouvaient que favoriser la croissance économique, les investissements étrangers, et donc leur situation. Cette nouvelle élite économique était persuadée que la démocratisation et la pacification du pays pourrait leur permettre de mieux participer aux échanges économiques et financiers internationaux : elle était prête à participer activement en faveur de la signature des accords entre les parties belligérantes.

Ces efforts étaient fortement soutenus par la communauté internationale, notamment par d’autres pays de l’Amérique latine, par la Communauté européenne, par des ONG internationales, etc.

Pendant dix ans de négociations difficiles entre les parties en conflit, mais aussi entre celles-ci et des représentants de la société civile, des accords sur des questions spécifiques se succédaient.

En janvier 1996, le « Partido de Avanzada Nacional », nouveau parti dirigé par les grandes élites économiques du pays, a accédé au pouvoir. M. Alvaro Arzú est devenu Président. Alors que les espoirs de pacification paraissaient diminuer, grâce à des négociations efficaces au sommet, les accords de paix ont été signés au Guatemala le 29 décembre 1996. Le cessez-le feu a été tout de suite une réalité. Mais ces accords allaient plus loin : ils prévoyaient une véritable réforme des rapports sociaux dans les domaines politique, militaire, économique, culturel, etc. Leur accomplissement allait permettre de répondre aux aspirations majeures de la société, à savoir, la justice sociale, la démocratisation du pouvoir, le respect des droits de l’homme et la construction d’une société pacifique.