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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Paris, 2005

Bilan économique de santé démocratique : Costa Rica

Bilan économique actuel de santé démocratique du Costa Rica via la description de la politique économique de la décennie perdue des années 1980 et l’analyse de la politique économique des années 80 à aujourd’hui.

Mots clefs : Analyser des conflits du point de vue économique | La responsabilité des autorités politiques à l'égard de la paix | Le libre échange peut-il aider à la paix ? | Fond Monétaire International | Gouvernement costaricien | Costa-Rica

I. Description de la politique économique de la décennie perdue des années 1980

Les années 1980, marquées par une crise économique sans précédent, ont constitué pour le Costa Rica et l’Amérique latine dans son ensemble, ce que l’on a appelé la « décennie perdue ».

Le Costa Rica a donc dû s’adapter aux nouvelles réalités de ces années de crise économique.

La présidence de Rodrigo Carazo (1978-1982) fut marquée par :

  • une récession profonde ;

  • l’aggravation de l’inflation ;

  • la crise fiscale ;

  • une dette externe devenue insupportable, et dont le paiement fut suspendu pendant plus d’un an, jusqu’à fin 1982.

Au niveau économique, le président Carazo a essayé de résister aux recettes néolibérales mais il a échoué au niveau du contrôle des finances publiques et s’est vu dans l’impossibilité de payer la dette extérieure, mettant son gouvernement dans une position qui s’est vite révélée insoutenable.

Ses successeurs se montrèrent plus souples, plus flexibles, gérant de manière plus subtile les différents problèmes de l’époque.

En effet, la politique économique de Luis Alberto Monge, membre de l’opposition (du PLN) et successeur de Carazo en 1982, pour un mandat de quatre ans, a permis un moratoire pour le paiement de la dette externe, et des négociations avec :

  • le FMI ;

  • des pays créditeurs ;

  • des banques commerciales ;

A cette époque, on assista à une libéralisation importante de l’économie, ainsi qu’à la promotion d’exportations non-traditionnelles. Toutes ces initiatives étaient conformes au fameux Consensus de Washington, c’est-à-dire à la politique économique néolibérale qui était alors à la mode à l’échelle internationale.

Toutefois, les compromis destinés à réduire la taille et le coût du secteur public ne furent mis en œuvre que de manière imparfaite. Cette faille n’est pas surprenante étant donné que l’Etat costaricien avait toujours joué un rôle important dans le domaine économique et social depuis les années 1940. Pensons aux nationalisations de domaines aussi fondamentaux que la santé, la sécurité sociale, l’éducation… Autant de secteurs où les fonctions de l’Etat ont impliqué une grande bureaucratie étatique. Ceci explique pourquoi la résistance à trop de libéralisation était grande au sein du gouvernement.

Mais bien qu’imparfaite, cette coopération économique valut au Costa Rica l’obtention d’une aide économique qui vint diminuer l’impact de la crise. Cette aide provenait des Etats-Unis, mais également d’autres pays comme le Japon.

Les gouvernements :

  • d’Oscar Arias (PLN, 1986-1990) ;

  • de Rafael Calderón Fournier (PUSC, 1990-1994) ;

  • de José Maria Figueres Olsen (PLN, 1994-1998) ;

  • et enfin de Miguel Angel Rodriguez (PUSC, 1998, 2002);

ont globalement suivi la même politique économique que celle mise en œuvre par Monge. Ainsi, cinq présidents consécutifs, issus des deux partis majoritaires (PLN et PUSC), ont suivi une politique économique orientée généralement vers :

  • la libéralisation progressive de l’économie ;

  • la promotion des exportations ;

  • la limitation ou la réduction de la taille et du champ d’action de l’Etat.

II. Analyse de la politique économique du Costa Rica des années 80 à aujourd’hui

La politique économique du Costa Rica a donc été à la fois stable et en accord avec la logique du Consensus de Washington.

Le résultat fut celui d’une croissance économique uniforme depuis 1983 ; une croissance qui entraîna des coûts sociaux importants mais qui ne démantela pas l’appareil étatique dans son rôle de bienfaiteur, de protecteur.

Nous pouvons d’ores et déjà signaler que le Costa Rica qui respecta les recettes du FMI, ne connut pas les conséquences désastreuses de son homologue argentin.

L’explication peut venir du fait que l’Etat costaricien a toujours mis un point d’honneur à préserver une certaine part d’autonomie et d’indépendance en intervenant dans les différents domaines (politiques, sociaux, économiques) et ne s’est pas plié autant que l’Argentine aux instructions de libéralisation et de déréglementation à outrance du FMI.

En effet, comme le dit justement John Peeter Pérez : « Pour tout pays du Tiers-monde il n’existe pas d’autres alternatives que de vivre dans le système global du capitalisme. Ne pas jouer le jeu pourrait coûter cher. Face à cette réalité, le meilleur moyen de préserver une certaine autonomie politique est de s’assurer que tout est en ordre au niveau interne » (1). Et c’est précisément ce que les gouvernements consécutifs du Costa Rica ont essayé de faire tant bien que mal depuis 1982 : gérer une ouverture économique à l’échelle internationale, tout en préservant une certaine autonomie et certaine indépendance d’action.

John Peeter Pérez baptise cette politique économique de « néolibéralisme qualifié » (2), dont le secret a été de maintenir une croissance modérée, tout en contrôlant l’inflation et le chômage. Ceci a permis notamment :

  • la réduction du déficit de la balance des paiements ;

  • la diminution de la dette extérieure.

Le tout sans que l’Etat ait été réellement mis à l’index et sans que les engagements étatiques relatifs à la prise en charge des services de santé et d’éducation n’aient été remis en cause.

Notes :

(1) : John Peeter Perez, La democracia de Costa Rica ante el siglo 21, San José, Editorial de la Universidad de Costa Rica, 2001, p.351.

(2) : John Peeter Perez, La democracia de Costa Rica ante el siglo 21, San José, Editorial de la Universidad de Costa Rica, 2001, p.356.