Fiche d’expérience

, Grenoble, 2013

L’or du Mali : modifications du code minier et privatisations

Le Mali illustre lui aussi comment les pays qui produisent des richesses nationales ne les détiennent pas, situation emblématique de la « malédiction des ressources » (resource curse) : cette association paradoxale entre une richesse nationale et le sous-développement.

Mots clefs : Utilisation responsable et durable des sols | Mali

Le secteur de l’or malien, régi par un code minier protecteur à l’indépendance, a fait l’objet de privatisations et de simplification dans les procédures d’investissement à partir des années 90.

Les changements des années 90

De nouvelles mines ont été ouvertes à partir des années 90 au Mali. Mali AngloGold possède depuis lors 3 gisements les plus importants qui représentent 90% de la production malienne. Pour assurer l’exploitation, la compagnie emploie des mercenaires pour la sécurité des mines, de la compagnie Defence Systems Limite (GB).

Les modalités de l’exploitation de l’or du Mali changent au début des années 90 sous le coup de la politique des ajustements structurels de la Banque mondiale : celle-ci est parvenu à imposer des réformes des codes miniers permettant des facilités d’investissements, des avantages fiscaux, des exonérations des taxes sur les premières années d’exploitation et le rapatriement des capitaux.

La décennie 90 est bien connue pour être la décennie de l’offensive des politique d”ajustements structurels. Pourtant on ne doit pas seulement à cette temporalité l’application de ceux-ci au secteur de l’or au Mali : il s’agissait également de remplacer les mines d’or sud-africaine qui venait à l’épuisement.

L’exploitation minière, jusque là entre les mains de l’État, va donc connaître un processus de privatisation.

Dans la période post-coloniale, il était important d’affirmer la souveraineté nationale, et les ressources nationales en général et minérales en particulier y ont contribué. En imposant des réglementations strictes pour garantir cette souveraineté, les États post-coloniaux ont pu de ce fait éloigner le secteur privé. Les politiques d’ajustement structurels ont ainsi ouvert des accès là où l’investissement étranger était

C’est ainsi que les États sont passés de propriétaires à actionnaires minoritaires aujourd’hui. Le gouvernement malien touche le strict minimum des royalties, ce qui est dénoncé par la FID comme une position intenable depuis les réformes des codes miniers.

La privatisation du secteur est-elle une bonne solution ?

  • réduit les parts de l’État

  • chasse les orpailleurs africains

  • livre les ressources aux compagnies étrangères

Le discours international sur les reproches faits aux gouvernements africains dans le manque de rentabilité de leur exploitation se retourne ainsi ironiquement vers ses auteurs : les grandes puissances qui ont une influence significative sur les politiques locales.

Et il n’est pas rare d’observer que les principales multinationales telles AngloGold investissent avec l’aide de la coopération française au développement. Enfin, la hausse du cours de l’or incite à prospecter et produire plus.

Les relations entre les acteurs du développement et les multinationales restent par certains aspects obscures.

La IFC, International Financial Corporation, ou SFI en français, créée en 1956 « par la communauté internationale pour promouvoir les investissements privés dans les pays en développement », possède un ancrage historique avec les milieux d’affaires américains. Elle regroupe 178 pays et reste dominée par les États-Unis qui concentrent 24% des voix (chiffres cités par la BM mais d’autres sources mentionnent 16%).

2012 Le code minier malien connaît de nouvelles modifications

Le code minier du Mali, comme ce fut le cas fréquemment dans d’autres pays, a été modifié etl es réformes ont été justifiées au nom de l’objectif de produire davantage grâce à « l’ ouverture de nouvelles mines, l’accroissement de la production d’or, l’amélioration de la gouvernance dans le secteur » (extrait de la communication du ministre des mines de l’époque). Ainsi la simplification des procédures doit favoriser le retour des investisseurs et des partenaires, accroître la production minière pour dynamiser l’ économie nationale.

Article 42 (nouveau)

« Dès l’attribution du permis d’exploitation, le titulaire du permis de recherche ou de l’autorisation de prospection entamera les démarches en vue de la création d’une société de droit malien dans laquelle l’État participera à hauteur de 10%, libre de toutes charges. Cette participation ne fera pas l’objet de dilution même dans les cas d’augmentation du capital et sera considérée comme des actions prioritaires. Lorsqu’un bénéfice net comptable sera constaté par la société d’exploitation, celle-ci prélèvera sur le bénéfice distribuable, c’est à dire le bénéfice de l’exercice diminué des pertes antérieures et de prélèvements pour constitution des réserves légales, paiement de l’impôt sur les sociétés et augmenté des reports à nouveau bénéficiaires, un dividende prioritaire qui sera versé à l’État. Ce dividende prioritaire, dont le taux sera égal à la participation gratuite de l’État dans le capital de la Société d’Exploitation (10%), sera servi à l’État avant toute autre affectation du bénéfice distribuable. L’État se réserve le droit d’acquérir une participation supplémentaire de 10% au maximum en numéraire, laquelle ne sera pas prise en compte pour la détermination du taux du dividende prioritaire. Le titulaire du permis de recherche ou de l’autorisation de prospection devra céder gratuitement le permis d’exploitation à ladite société dès sa création. »

Depuis le début de l’année 2012, le code minier malien reste en cours de modification, sans parvenir à remporter l’adhésion de l’ensemble des acteurs concernés.

Quelle mobilisation internationale ?

« No Durty Gold 2004 » est une campagne internationale soutenue par Oxfam America et les Amis de la Terre sur le thème : « 20 tonnes de déchets pour une seule bague ». L’idée d’un « code de bonne conduite » a été adoptée en septembre 2006 par le Council for Responsible Jewellery Practices . Il s’agit d’un comité créé à Londres, regroupant une soixantaine de membres parmi lesquels des grandes associations internationales de commerce ; le lobby de l’or World Gold Council ; les entreprises minières AngloGold et Newmont ; des diamantaires mondialement connus et des grandes marques de bijouterie de luxe. Ils mettent en avant leur propre code de RSE, calés sur ceux des grandes banques internationales et des organismes financiers.

Perspectives :

La question de l’exploitation des ressources naturelles et de la répartition des revenus qu’elles suscitent

constitue un autre des enjeux qui s’impose au Mali dans la transition qui s’ouvre désormais.

Notes

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