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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, , , , Paris, mars 2014

Essais nucléaires pacifiques

Le 8 décembre 1953 le président américain Dwight Eisenhower lance l’initiative « Atoms for Peace » en vue de favoriser les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire. Le monde scientifique et technique place alors de très grands espoirs dans l’utilisation de l’énergie nucléaire, par exemple pour la propulsion de véhicules (projet de Ford Nucleon25).

Les États-Unis se déclarent alors prêts à soutenir la diffusion des technologies nucléaires à tout Etat qui s’engagerait à les développer dans un but exclusivement civil (recherche, production d’énergie). Des essais nucléaires sont alors conduits sous le prétexte de développer des utilisations civiles de l’atome. Les États-Unis, l’Union Soviétique, la France, mais aussi la Chine puis l’Inde vont ainsi s’engager dans différents programmes d’essais nucléaires dit « pacifiques ». Cependant, nul n’est dupe : il est totalement impossible de distinguer un essai nucléaire militaire d’un essai pacifique. Non seulement l’engin est le même, mais les données qui résultent de ce type d’expérience ne peuvent au final qu’alimenter les différents programmes de recherche militaires. La notion d’explosion « pacifique » ouvre alors une véritable boîte de Pandore dont vont profiter les différentes puissances nucléaires, de fait ou en passe de le devenir :

  • Les Etats-Unis lancent un vaste programme d’essais nucléaires civils, dénommé Plowshare (« soc de charrue ») sous la responsabilité de la Commission de l’énergie atomique (AEC) (aujourd’hui le Departement of Energy). L’objectif est d’utiliser des explosifs nucléaires pour réaliser d’immenses travaux de génie civil. Le 12 octobre 1961, un premier essai nucléaire, baptisé Gnome, est effectué dans ce cadre sur le site du Nevada. Au total, 27 essais nucléaires sont réalisés jusqu’en mai 1973 dans différents Etats (Nevada, Nouveau-Mexique et Colorado) pour des usages pacifiques, en vue, par exemple, de creuser des ports en eaux profondes en Alaska. Le programme Plowshare est définitivement arrêté́ en 1975

  • Les expérimentations nucléaires souterraines conduites par la France au Sahara entre le 7 novembre 1961 et le 16 février 1966 ont des finalités à la fois militaires et civiles. Dénommés Michèle, Monique et Georgette, ces trois essais souterrains sont destinés à vérifier « les conditions de sécurité́ à appliquer dans le cas où l’utilisation future de l’outil nucléaire serait envisagée pour l’exécution de grands travaux de génie civil ». Ils entrent dans le cadre d’un programme désigné sous le nom d’Apex, pour « applications des explosions ».

  • L’inde a procédé le 18 mai 1974 dans le désert du Rajasthan à un essai pacifique, appelé́ The Buddha is Smiling. New Delhi s’empressa d’indiquer que cette expérience n’avait d’autre ambition que d’aider à la réalisation de grands travaux de génie civil. En réalité́, sous l’apparence d’une action pacifique, elle entendait montrer au Pakistan et à la Chine sa capacité́ à maîtriser les technologies nucléaires à des fins militaires.

Le Traité de non-prolifération nucléaire, ouvert à la signature le 1er juillet 1968, permet, dans son article V, à tous les Etats non dotés d’armes nucléaires y adhérant de bénéficier des « avantages pouvant découler des applications pacifiques, quelles qu’elles soient, des explosions nucléaires […] sur une base non discriminatoire ». Certainement encouragées par cette disposition, l’Egypte et la Thaïlande envisagèrent la réalisation de grands travaux hydrauliques au moyen d’explosifs nucléaires. Ces propositions n’ont pas eu de suite.

Par la suite, la Conférence de révision du TNP de 2000 a précisé, dans son document final, que l’article V du Traité devait être interprété en tenant compte de l’adoption, par l’Assemblée générale des Nations Unies, du projet de Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, qui interdit toutes les explosions nucléaires, y compris à des fins pacifiques.

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