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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Paris, 2005

Le rôle des organisations non gouvernementales (ONG) dans la construction de la paix

Les ONG sont aujourd’hui indéniablement devenues des acteurs incontournables dans la résolution de conflits et de situations de crises.

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Les « organisations non gouvernementales » (O.N.G.) s’insèrent parfaitement dans la typologie d’institutions cherchant à établir un état de paix. Elles ne sont pas aussi récentes que leur dénomination actuelle pourrait le laisser coire, car ces ONG sont en réalité la continuation des « œuvres » et « institutions de bienfaisance » que le monde occidental a toujours entretenu.

Elles sont actuellement assimilables à des institutions dans le sens retenu ici, car elles sont incontournables dans la résolution des conflits, et incitent le pouvoir étatique à l’action en faisant du lobbying et en alarmant l’opinion publique.

Les institutions charitables ont toujours été associées à l’idée de préserver la paix sociale. Toutefois, elles se distinguent des institutions politiques et religieuses, car si celles-ci sont vouées à la pérennité, les institutions charitables doivent dans l’idéal être temporaires, pour pallier aux imperfections momentanées des systèmes politiques et sociaux établis.

Il n’en demeure pas moins que les « œuvres » portaient souvent le nom « d’institution », et qu’elles étaient utilisées par les institutions religieuses et civiles ; la première donnait sa bénédiction sur le caractère de bienfaisance de l’œuvre, et la seconde avalisait les statuts juridiques réglant le fonctionnement. La plupart des institutions charitables créées entre le haut Moyen Âge et le XXe siècle l’ont été sous cette double tutelle. Pour encourager le mouvement, l’Église catholique a développé le système des « indulgences », accordant pour les financeurs la rémission des péchés, tandis que l’État a toujours accordé des aménagements fiscaux pour inciter les donateurs.

Enfin, la morale populaire a toujours jugé positivement le soutien d’institutions charitables, assimilé à la préservation de la paix sociale. Les statuts d’une institution charitable créée en 1879 (art. 2) témoignent de la reconnaissance sociale faite à ceux qui soutiennent ce type d’institutions : « l’œuvre accepte le concours de toutes les personnes charitables et accorde le titre de bienfaiteur ou de souscripteur à celles qui voudront bien contribuer à son entretien et à son développement ».

Les ONG sont aujourd’hui indéniablement devenues des acteurs incontournables dans la résolution de conflits et de situation de crises. Leur neutralité est affichée depuis la création de la Croix rouge en 1864, ce qui leur confère un pouvoir de médiateur unique. Les bons sentiments qui les animent et l’aide apportée sur le terrain en font des institutions respectées le plus souvent par l’ensemble des belligérants dans la résolution des conflits.

Si les ONG revendiquent leur appartenance au monde de « la société civile », celles-ci relèvent parfaitement de la logique d’institution, car leur fonctionnement est fortement centralisé, disposant d’une base arrière gestionnaire des diverses interventions et fortement hiérarchisée.

Les ONG étaient initialement dédiées à apporter une aide ponctuelle d’urgence, puis elles ont déplacé leurs actions vers le développement, la prévention. Cette seconde direction prise par leurs activités en fait à double titre un acteur de paix.

Il faut toutefois remarquer que la mission initiale d’assistance neutre des ONG peut être dévoyée par des actions marquées politiquement. Les actions de développement qu’elles coordonnent sont souvent marquées par les valeurs, la culture, les intérêts du pays donateur. Elles sont parfois également utilisées comme des outils de politique extérieure : un projet de loi déposé par M. Poutine confie aux services secrets la surveillance des organisations humanitaires étrangères à l’œuvre en Russie, car le président russe a pu voir le rôle joué par les ONG dans le passage à l’Ouest des ex-pays soviétiques (Ukraine, Géorgie, pays d’Europe centrale…).