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En librairie

Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Montargis, 2000

Familles : passer de la guerre au dialogue

La médiation familiale vient d’Amérique du Nord. Elle a été introduite en France au milieu des années quatre-vingt à l’initiative de professionnels des secteurs psychosociaux, juridiques, associatifs. Elle s’inscrit dans une démarche visant à aider les couples en instance de divorce à trouver des solutions aux questions qui se posent à eux : la manière dont chacun va rester parent, le partage des biens, etc.

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En France, depuis quelques années, le nombre de divorces prononcés stagne : environ 120 000 par an. Le plus souvent les enfants de parents divorcés vivent avec leur mère. Les causes des divorces sont multiples : l’ennui, les violences conjugales, l’adultère… à ces motifs s’ajoutent des facteurs tels que la perte d’influence de la religion, le chômage qui aiguise les tensions au sein du couple, l’indépendance financière dont bénéficient de plus en plus de femmes, etc. Les premières années après le divorce sont souvent douloureuses pour le père (ou la mère) qui ne vit plus quotidiennement avec ses enfants. Les moyens financiers manqueront, parfois, à celui ou celle qui élèvera seul(e) ses enfants et à l’autre qui devra assumer une pension alimentaire en plus de ses frais personnels.

Le couple avec enfant, marié ou concubin, peut recourir à la médiation familiale en cours de divorce mais également avant toute procédure de séparation ou de divorce ou encore après le divorce pour obtenir de changer certaines dispositions du jugement. Dans certains cas une assistante sociale (ou un avocat) peut suggérer aux conjoints de s’adresser à un médiateur. Il arrive parfois que le juge prenne une ordonnance pour obliger un couple qui ne parvient pas à trouver un terrain d’entente (sur l’éducation des enfants en particulier) à rencontrer un médiateur.

La plupart des définitions de la médiation familiale englobent les éléments suivants :

  • La responsabilité des parties dans la définition d’une solution à leurs différends;

  • Le rôle du médiateur comme tiers impartial et l’égalité des droits entre les parties ;

  • L’importance de la communication dans la recherche d’accords négociés en utilisant des principes de coopération.

En aucun cas la médiation familiale ne s’émancipe du cadre juridique. Ainsi le protocole d’accord élaboré en médiation a besoin d’être homologué par le juge. Le médiateur avec lequel le couple prend rendez-vous est un professionnel spécialement formé qui est tenu au respect d’un code de déontologie. Il est rémunéré par les conjoints.

Parler du passé commun

Une médiation familiale se déroule en trois phases :

  • Première phase : le médiateur fait connaissance avec le couple lors d’entretiens (trois le plus souvent) où chaque partie donne des informations sur les raisons qui l’amènent à envisager une rupture.

La médiatrice Annie Babu souligne que cette première phase « est le seul moment dans le processus de médiation où ils pourront parler de leur passé commun pour mieux construire ensemble un futur séparé […]».

  • Seconde phase : l’objectif est la négociation sur les enjeux de la rupture.

Cette phase se divise en trois étapes :

  •  

    • déterminer le ou les lieux de vie principaux des enfants, le temps passé avec l’autre parent et la manière dont les parents continueront d’être responsables de leurs enfants sur le plan affectif et éducatif ;

    • élaborer le budget consacré aux enfants et répartir ces coûts entre les parents ;

    • enfin, négocier le partage des biens.

Selon les situations, les deux dernières étapes peuvent être abordées par le médiateur en collaboration avec un autre professionnel (juriste, notaire, etc.) apportant des informations complémentaires.

Pour chacune de ces étapes les points d’accord et de désaccord sont recherchés et une définition des objectifs à atteindre est établie par les parents avec l’aide du médiateur. La recherche de solutions multiples favorables à la résolution de leurs conflits est favorisée. Au stade des prises de décisions après négociations des options retenues pour chacune de ces étapes, le médiateur peut demander aux parents de consulter chacun leur avocat ou leur notaire. Ces derniers peuvent alors voir avec leur client si les accords respectent leurs droits. Au terme de cette seconde phase de la médiation un document, nommé « projet d’entente » ou « protocole d’accord », est rédigé. Celui-ci reprend les intentions, les principes et les décisions discutés et définis par les parents.

  • Troisième et dernière phase de la médiation que décrit Annie Babu :

« Pour les couples qui souhaitent officialiser leur rupture, cette phase pourra prendre plusieurs formes selon le type de médiation, indépendante ou judiciaire :

  •  

    • l’intégration à une décision de justice;

    • l’éventuelle homologation judiciaire.

Dans les deux cas il peut y avoir l’intervention d’un ou plusieurs avocats selon le choix des membres du couple. S’il arrivait des points de désaccord, les parents pourraient revenir ultérieurement en médiation pour discuter entre autres des changements proposés par les avocats ou les notaires. »*

Donner aussi la parole aux enfants

Les enfants sont au coeur du processus de médiation. Ils peuvent, sous certaines conditions, y prendre part physiquement. Cela présente l’avantage de leur donner la parole, de leur permettre de faire des suggestions, de les aider à parler de leurs craintes et de leurs besoins ; de les accompagner dans le deuil qu’ils ont à faire de ne plus vivre avec leurs parents ensemble en les invitant à parler de la manière dont ils imaginent leur vie future. Si la médiation familiale constitue un recours efficace pour les couples en instance de divorce soucieux de gérer au mieux cette étape difficile de leur vie, il n’en demeure pas moins que cette pratique a ses limites. Par exemple la violence physique de la part de l’un ou des deux conjoints ne peut relever d’une simple médiation familiale mais de la justice. Il arrive aussi que l’un des conjoints se rende seul chez le médiateur. Ce dernier ne peut engager le dialogue avec ce père (ou cette mère) sans rompre avec son impartialité. Enfin, parfois, l’un des conjoints ne veut tout simplement pas se séparer.

À travers la médiation familiale s’élabore une recherche de compromis par les couples en instance de divorce en ce qui concerne l’éducation, les besoins matériels ou l’affection qu’ils devront toujours prodiguer à leurs enfants une fois leur rupture prononcée et la gestion des situations administratives et financières nouvelles générées par leur séparation. La médiation familiale ne peut répondre à toutes les situations se présentant en matière de conflits conjugaux. Cependant elle connaît aujourd’hui un essor encouragé par les pouvoirs publics. Au-delà de l’aspect juridique, son objectif et son effet quand elle réussit est de rétablir le dialogue souvent rompu entre les époux qui viennent de vivre une rupture douloureuse. Elle permet, souvent, de passer du stade de la violence à celui de la négociation et aide les personnes à se reconstruire après cette épreuve et à envisager la relation avec l’ex-mari ou l’ex-femme dans la durée et pour le bien des enfants.

Pour ces derniers, la médiation familiale permet d’établir un contrat où les parents séparés reconnaissent qu’ils ont encore un point commun : leurs enfants, et qu’ils seront encore présents pour préparer l’avenir de ceux-ci. Ainsi, la médiation peut aider enfants et adultes à passer du stade de la crise affective, voire de la guerre familiale, au stade de la relation, du dialogue (éventuellement conflictuel), de la coopération dans l’intérêt de toutes les personnes concernées.

Jean-François Rivière, Non-Violence Actualité.

Notes :

  • Extraits du chapitre « la médiation familiale étape par étape ou la structuration d’une pratique professionnelle », Annie Babu, La médiation familiale, Éd. Érès, 1997,272p.

  • Ce texte reprend quelques éléments publiés dans « L’école des parents » de décembre 1993 (5 impasse de Bon-secours, 75543 Paris, CEDEX 11) et dans « Le Parisien-Aujourd’hui », 14 janvier 1998.