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, RDC, marzo 2017

La démocratie à l’épreuve de la violence urbaine à Kinshasa

L’article a été rédigé avant l’accord du 31 décembre 2016 négocié par la Commission Épiscopale Nationale congolaise, permettant d’éviter une violence de grande ampleur suite à l’absence d’élection et donc d’alternance à la présidence de la république.

Keywords: Las dificuldades de una cultura de paz en una población que ha vivido la guerra | Respeto del pluralismo político | Oposición popular | Respeto de la ley y lucha en contra de la corrupción | Oponerse a la impunidad | La responsabilidad de las autoridades políticas con respecto a la paz | La democracía, factor de paz | | República Democrática del Congo | Kinshasa

Introduction

La ville de Kinshasa a connu le lundi 19 et le mardi 20 septembre 2016 de nouvelles violences d’une ampleur sans précédent. La marche pacifique organisée par une frange de la Dynamique de l’Opposition s’est transformée en mouvement insurrectionnel. Le Rassemblement de l’opposition qui ne participe pas au dialogue convoqué par le président Kabila estime que ce forum serait une astuce pour contourner les dispositions constitutionnelles limitant le nombre de mandats du chef de l’État. La marche avait pour objectif le dépôt de Mémorandum à la Commission Électorale Nationale et Indépendante. Les journées du 19 et 20 septembre 2016 resteront ancrées dans l’imaginaire national par la portée symbolique que ces événements ont pris.

Dans un souci d’une réflexion commune autour de l’actualité, cet article propose d’appréhender la marche de l’opposition comme un moyen d’expression et de pression bien souvent qualifié de contestataire, permettant de mettre des idées en débat et de sortir d’une vision négative du conflit. En effet, nous avons pour habitude de penser la conflictualité uniquement dans son aspect violent et destructeur. Or, si l’on part du postulat selon lequel chaque individu porte en lui des intérêts et des objectifs divergents, le conflit est un phénomène normal et inhérent à chaque société. Il peut être positif, et constituer une opportunité de changement : en faisant éclater au grand jour un certain nombre d’injustices, de souffrances, de discriminations, le conflit va rendre possible la mise en place d’actions pour tenter d’y remédier.

I. Les enjeux de la démocratie

L’enjeu fondamental est la démocratie comme culture. La culture démocratique avec ses règles : la hiérarchie des normes, la séparation des pouvoirs, bref, l’État de droit, l’État qui se soumet au droit, qui récuse l’arbitraire, qui a appris de l’histoire que la fin ne justifie pas tous les moyens. Ce qui est en jeu, enfin, la question de l’alternance au pouvoir, c’est la culture démocratique avec son esprit. Car l’individualisme contemporain, poussé parfois jusqu’à l’absurde et l’extrême, finit par tourner le dos à l’esprit de la démocratie, considérant chaque opinion divergente insupportable, chaque vote majoritaire inacceptable, chaque compromis inexcusable.

Ces troubles ont bouleversé, déstabilisé les institutions et causé des pertes en vie humaine. Ce massacre de populations a eu un impact sur l’économie. Au-delà, c’est une certaine conception de la RDC et de son modèle de démocratie qui est aujourd’hui interrogée.

Les Congolais aspirent à plus encore que les Burkinabais, reconnus comme étant le peuple le plus démocratique en Afrique et disent : « le combat sera long, éprouvant, difficile ». L’opposition est en train de projeter l’avenir du Congo au-delà du mandat de Joseph Kabila1.

Les élections libres, transparentes et crédibles constituent un pilier de la démocratie. Elles constituent un mécanisme permettant de concilier l’expression de choix collectifs sur des thèmes concrets, la viabilité et la continuité de l’État. La démocratie en RDC est appelée à être représentative et participative, et les élections doivent en constituer l’élément pivot. On ne peut analyser le fonctionnement des institutions dans une démocratie sans procéder au préalable à l’examen du mécanisme permettant la légitimation du pouvoir qu’est le système électoral. Or, la confusion et la tension qui ont entouré les révisions de la Constitution et de la loi électorale ainsi que l’organisation des scrutins de 2011 nourrissent un climat politique de grande suspicion. Cette ambiance politique échaudée, présente une forte probabilité d’amplifier la crise politique dont personne ne sera en mesure de mesurer les conséquences.

Le constat est malheureux du fait que jusqu’à ce jour le cycle électoral congolais connaît des problèmes d’arriérés des scrutins (scrutins provincial et local) non encore organisés comme prévu dans l’accord de Sun City, mais aussi dans la constitution du 18 février 20062 promulguée par le président de la République. L’importance des élections en RDC traduit la volonté du peuple de s’approprier la démocratie et d’asseoir la culture démocratique.

En réalité, la démocratie a servi d’effet de brouillage ou comme mode d’ajustement politique des pouvoirs ou encore comme un instrument d’organisation politique des contestataires qui dénonçaient le non-renouvellement de l’élite politique, les « dinosaures » d’une classe politique vieillissante qui s’accrochaient. La démocratie et les élections qui devaient l’entraîner ont elles-mêmes été des facteurs de crise politique : trucages des résultats, séquestration des opposants et déni de nationalité à des opposants potentiels3.

II. Nouvelles violences à Kinshasa, incertitude de paix ?

La situation sécuritaire reste très précaire à Kinshasa. En fait, le pays ne cesse d’enregistrer des cas de massacres depuis un certain temps. L’État est devenu quasi défaillant et fragile de par sa légitimité contestée (avec l’expiration des mandats du président et des députés), sa perte de contrôle de certaines parties du territoire et/ou son manque de capacité à garantir la stabilité, la paix, etc.4

Le souvenir douloureux des massacres du 13 au 14 août 2016 à Beni est là pour nous le rappeler. Il faut être fort psychologiquement pour éviter l’état de tremblement et de stupeur qu’ont connu les Américains après le 11 septembre 20015 ou les Burkinabais en 2014. Didier Le Bret disait : « Nous sommes dans un monde dont l’instabilité est la seule chose prévisible ».6

Des sièges des partis de la majorité présidentielle ont été brûlés, même des effigies du président Joseph Kabila. La dernière tuerie d’envergure a eu lieu du lundi 19 au mardi 20 septembre dans tous les quartiers de Kinshasa. Comme à Beni du 13 au 14 août, 51 personnes ont trouvé la mort dans une agression à la machette, selon la société civile de Beni tandis que le gouvernement avance le chiffre de 42 morts7.

L’opposition est la seule capable de forcer le pouvoir en place à respecter la Constitution, de faire en sorte que le président en exercice ne puisse pas briguer un troisième mandat consécutif. À l’heure actuelle, cette opposition est déterminée à se battre jusqu’au bout. La majorité présidentielle semble se heurter à des problèmes de légitimité et, tôt ou tard, envisagerait de former un gouvernement d’union nationale pour apaiser les tensions dans le camp adverse, malgré le boycott de l’opposition à participer au dialogue. Si l’opposition et la majorité parlent ensemble de paix, d’élections ou de démocratie, il faut garder les idées claires, à cause des dangers que cela induit : tous ceux qui utilisent ces mots, ne souhaitent pas nécessairement la liberté et la justice8.

 

Limites de la police nationale congolaise

Le manque de professionnalisme dans l’encadrement des manifestations organisées par l’opposition amène la police nationale congolaise à recourir aux forces armées de la République qui ne sont pas formées ni équipées dans l’encadrement des marches publiques. Les pertes de vies humaines enregistrées lors de ces événements seraient attribuées à la police qui a une fois de plus tiré sur les manifestants.

La communauté internationale a beaucoup critiqué les répressions et les actions militaires menées par la police et l’armée de la RDC contre les civils à Kinshasa. Les difficultés éprouvées par la coalition des partis de l’opposition qui s’est constituée pour mener le combat contre le pouvoir en place traduisent aussi cette perplexité quant aux réponses à apporter. Tout comme le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI) s’interrogeait au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 à Paris sur la stratégie de bombardements de l’État islamique en Syrie et en Irak9, on peut se poser des questions sur l’action militaire contre la population civile.

Il ne s’agit pas de mettre en doute le fait que la marche soit organisée pour faire pression sur ceux qui sont au pouvoir, il est plutôt question de s’interroger sur la stratégie adoptée pour renverser le pouvoir en place. La riposte militaire, bien qu’essentielle, ne convient pas ou ne suffit pas. Elle montre ses limites. La population met l’État devant un dilemme politique : repousser la population sans tuer de civils.

Théoriquement, en démocratie, le maintien de la sécurité intérieure et extérieure relève de la mission centrale de l’État, qui dispose du monopole légitime de coercition contrôlé démocratiquement. Alors que la protection des frontières nationales (la sécurité extérieure) est habituellement du ressort de l’armée, le maintien de l’ordre public dépend de la police et du système judiciaire10.

Des politiciens ont instrumentalisé les jeunes tandis que des policiers corrompus se sont servis des opérations pour leur enrichissement personnel. La revendication a été appuyée par des jeunes gens diplômés mais sans emploi, désabusés et sans perspective d’avenir. Et ils ont été rejoints par des jeunes exclus de leurs familles (Shegué ou enfants de la rue) et des jeunes voyous (Kuluna).

Les réponses sont socio-économiques pour ouvrir des horizons à la jeunesse en termes d’éducation, d’emploi et de développement. Car la pauvreté généralisée et la marginalisation constituent la niche sur laquelle les Congolais se sont construits. La situation économique ne fait qu’empirer, le taux de change est passé de 92000Fc à 120 000Fc pour 100USD, la non tenue des promesses électorales par les détenteurs du pouvoir, la dérive de la gestion publique, la paupérisation croissante de la majorité des couches sociales congolaises sont autant de maux qui fâchent les Congolais.

Politiquement, c’est contre la corruption et l’impunité que les États doivent s’employer afin de construire un autre modèle de société à proposer11. Le dialogue inclusif convoqué par le chef de l’État, sous l’égide du facilitateur Edem KODJO, n’a pas donné un bon résultat, l’accord du 18 octobre 2016 a connu un échec, d’où la convocation d’un autre dialogue sous la conduite de la Commission Épiscopale Nationale Congolaise (cenco). Les Congolais souhaitent la tenue des élections dans le délai constitutionnel. Ainsi, l’éternel opposant Étienne TSHISEKEDI, lors du congrès de rassemblement de l’opposition tenu à Kinshasa au début du mois de septembre 2016, avait promis un carton jaune à Joseph Kabila le 19 novembre et le 19 décembre, un carton rouge lui sera donné. Ce message retient l’attention des Congolais qui s’interrogent sur ce que réserve le 19 décembre, date de la fin du deuxième mandat du président Kabila.

La stratégie militaire ne tient pas suffisamment compte de la nécessité de protéger les populations civiles directement exposées aux balles. Les familles des victimes des événements récents du 19 et 20 septembre et la population kinoise ont boycotté la participation au culte d’action de grâce organisé le vendredi 7 octobre par le gouverneur de la ville de Kinshasa en mémoire des illustres disparus. À la cathédrale du centenaire de protestant et au centre d’accueil de Kimbanguiste, il n’y avait pas de gens ni même les familles concernées12.

Le Congolais n’est plus dupe depuis qu’il a appris à faire valoir son droit d’électeur pris en otage par les fraudes électorales de novembre 2011. Il observe et enregistre. Même s’il ne semble rien comprendre aux manipulations politiciennes en tout genre, il intériorise que les choses doivent impérativement changer dans la bonne direction. L’État de droit démocratique factice qui caractérise le régime politique actuel ne résistera pas à l’indignation et à la volonté populaire qui appelle un changement de cap audacieux, patriotique et responsable. Les élections en 2006 et 2011 ont-elles réellement contribué à consolider la cohésion nationale, la paix civile et la démocratie en RDC ?

III. Quelle leçon tirer de ces événements?

Il est question ici des événements survenus les 19 et 20 janvier 2015, suite à l’adoption du projet de loi électorale à l’Assemblée Nationale le 17 janvier 2015. Les manifestations de janvier 2015 en République démocratique du Congo étaient organisées par l’opposition contre ce projet de loi électorale, très controversé, car il conditionnait la tenue de l’élection présidentielle en 2016 aux résultats d’un recensement. Les députés de l’opposition estimaient que ce recensement ne serait pas fini avant 2016, l’année prévue pour l’organisation du scrutin et qu’il s’agit d’une manœuvre pour permettre à Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir après la fin de son second mandat13.

Nous nous demandons « quelles sont les vertus de la démocratie dans lesquelles nous nous reconnaissons. Sur quoi nous pouvons transiger sans nous perdre. Sur quoi nous pouvons faire des compromis sans nous égarer. Et sur quoi nous devons au contraire tenir. Tenir sans composer. Tenir sans faiblir »14

Face à ces violences, nous disons que « ce qui est en jeu, fondamentalement, c’est la culture démocratique avec ses règles, ses valeurs et son esprit ». Plus encore, « c’est une certaine conception de la RDC et de son modèle de société qui est aujourd’hui interrogée »…. Il est temps que les acteurs politiques congolais puissent « éclairer les débats (dialogue) pour fixer des repères et un cap et pour que la population congolaise soit fidèle à elle-même »15.

La victoire de la démocratie est inéluctable car elle dispose d’une force qui rassemble les énergies et qui devient irrésistible, c’est la « liberté »16. La question de l’alternance au pouvoir, est au cœur de débat. À cela s’ajoute la question de l’emploi qui est donc au centre des problèmes et des politiques. Celui-ci touche au développement, à ses capacités de transformation et aux infrastructures. À travers ces événements, le peuple congolais en général, les Kinois en particulier, ont voulu exprimer leur « ras-le-bol ». C’est l’occasion de nous interroger sur le sens de la culture démocratique des acteurs politiques.

L’objet qui nous motive aujourd’hui est infiniment plus sombre, tragique même : la violence. Et, avec elle, la longue, la terrible, l’usante épreuve qu’elle impose à notre jeune démocratie.

Il est impossible de dire à quel degré nous avons tous été bouleversés et même changés par les violences et massacres des 19 et 20 septembre 2016 à Kinshasa, qui ont fait 36 morts d’après le porte-parole du gouvernement17 et plus de 65 morts selon la radio Okapi18. Le massacre de Beni qui a fait plus de 36 morts selon le gouvernement, ainsi que celui des 19 et 20 janvier 2015 dont le bilan n’a jamais été connu. Les forces aveugles qui ont frappé nos villes ne nous ont pas seulement arrachés à la torpeur de notre vie quotidienne. C’est comme si elles avaient révélé la singularité de notre vie collective.

Comme des centaines de millions d’Africains, nous avons eu la chance de naître et de grandir en RDC. La démocratie, nous n’avons pas eu à la conquérir : elle nous a été imposée. L’État de droit, nous n’avons pas eu à le bâtir, et il ne faisait pas partie de notre héritage. Contrairement à presque toutes les générations qui nous ont précédés, une majorité d’entre nous n’a pas connu la liberté.

Et cela ne s’est pas arrêté là : jamais autant de gens ont pu accéder à l’éducation ; jamais autant de personnes ont pu profiter d’une protection sociale ; jamais autant de femmes ont pu choisir librement leur vie19.

Beaucoup de Congolais ne profitent pas au quotidien de la sécurité que nos institutions semblent leur promettre. Mais enfin il est incontestable que nous n’avons pas atteint un niveau moyen de bien-être et de sécurité.

Ces émeutes ne sont pas les premières, bien sûr, mais par leur forme, leur message, elles visaient le pouvoir et étaient tournées contre lui. Car il ne faut pas se méprendre à leur sujet. Les combattants ont ensanglanté les rues de Kinshasa. Ils sont hostiles à ce que fait le pouvoir en place, aux décisions que les autorités prennent ou aux objectifs qu’elles poursuivent.

Le Front citoyen 2016, une plate-forme opposée à tout report de la présidentielle  censée se tenir cette année, mais devenue hautement improbable note  avec regret « l’échec de dirigeants congolais à ramener la paix dans le pays »20.

La plupart de manifestants sont des jeunes, désœuvrés, sans emploi, manipulés par les acteurs politiques et espérant retrouver un État de droit et/ou la vie sociale sera améliorée. Dans une interview, l’un des jeunes membres de Mouvement Social pour le Renouveau (MSR) nous dit : « Nous voulons un État de droit, le respect des textes, les élections »21.

Du fait que l’État, chez nous ajoute-t-il, est administré dans l’intérêt de la minorité qui est au pouvoir et non d’une majorité, notre régime a pris le nom de démocratie. La liberté n’est pas de règle dans notre gouvernement et dans nos relations quotidiennes.

La fièvre qui s’est emparée de Kinshasa les 19 et 20 septembre 2016 a donné des sueurs froides jusqu’au sommet de l’État. Cette marche a permis à l’opposition de s’unir pour mobiliser des jeunes désabusés. Les violences du 19 et 20 septembre 2016 montrent que – quand bien même le résultat du dialogue politique de la cité de l’Union Africaine pouvait être satisfaisant aux yeux d’une certaine opinion – en l’absence du Rassemblement conduit par son président TSHISEKEDI, la paix serait entachée de beaucoup d’incertitudes.

IV. Comment sortir de cette impasse ?

La RDC n’a connu aucune alternance démocratique depuis son indépendance de la Belgique en 1960. Elle s’est engloutie dans un chaos généralisé, avec des coûts visibles et invisibles incalculables. La balkanisation de la RDC tant redouté risque de devenir une réalité.

Il est clair que la majorité des Congolais et les politiciens congolais regroupés au sein du Rassemblement des Forces Politiques et Sociales Acquises au Changement (i.e. l’UDPS et Alliés, la Dynamique de l’Opposition, le G7, et  l’Alternance pour la République) n’avaient pas accepté les résolutions issues du dialogue de la Cité de l’Union Africaine, facilité par l’ancien Premier ministre togolais Edem Kodjo. 

Ainsi, l’idée d’un nouveau dialogue sous la facilitation des évêques est venue. Nous pensons, à notre avis que, le dialogue porteur d’une solution adéquate pour sortir de l’impasse, c’est bien l’annonce du chef de l’État, qu’il ne sera pas candidat à sa propre succession. Le reste viendra par surcroît. Si le dialogue des évêques ne peut tourner qu’autour de l’organisation des élections, il sera difficile que le pays se remette sur une voix démocratique.

Les événements des 19 et 20 septembre 2016 avec toutes leurs douloureuses expériences ont démontré que la descente dans les rues de la capitale et les autres grandes villes du pays a ses limites, d’autant plus que, sans une planification stratégique et un encadrement adéquat de la jeunesse, les actions de rue de grande envergure ne parviendront jamais à chasser le président au pouvoir. La journée du 20 décembre apparaissait comme la dernière chance de renverser la vapeur.

Conclusion

Comment répondre à la violence urbaine à Kinshasa ?

La violence est un processus dont les mécanismes cherchent à éliminer l’autre, il est donc facile de concevoir qu’on ne construit rien dans la violence et qu’on ne résout rien durablement dans la violence. Il est inutile de recourir à la violence puisqu’en définitive pour en sortir il faudra y renoncer. La violence ne permet pas non plus de sortir du conflit. L’approche de la transformation de conflit exclut le recours à la violence pour sortir du conflit car il consisterait seulement à reproduire le rapport de force, ou à l’inverser, mais pas à en sortir22.

Le massacre des innocents a meurtri Kinshasa et touché par ricochet la RDC toute entière. L’onde de choc a été puissante. Le coup de semonce de Janvier 2015 n’avait pas vraiment servi de leçon pour dénoncer le risque d’atteinte aux droits de l’homme. Ce qui arrive aujourd’hui, n’est qu’un début. Si le gouvernement savait anticipé, il pouvait éviter les manifestations violentes de janvier 2015 et septembre 2016 qui ne sont que les réactions politiques à des manifestations organisées de la part des populations face au gouvernement de Joseph Kabila qui n’envisageait pas organiser la fin de son règne. Entre échéance électorale, crise économique et sociale et pression des populations (opposition) qui veulent l’alternance au pouvoir et non pas un troisième mandat, les partis politiques issus de la Majorité Présidentielle suivront-t-ils cette opinion ?

La période actuelle demande aux gouvernants congolais une anticipation sécuritaire avec courage de faire montre de la culture démocratique sans pression ni douleur, sang et larmes, ni profiter pour arrondir leurs fins de mois, accentuant ainsi le glissement vers le chaos. La RDC se trouve à la croisée des chemins, interpellée par son passé et s’interrogeant sur son devenir. Comment penser l’avenir dans un pays où la culture démocratique n’est pas de mise ?

Notas

  • 1RDC : après le passage de Ban Ki-moon, Kyungu favorable au dialogue sous l’égide de l’ONU,26/02/2016, disponible sur www.radiookapi .net, consulté le 22/09/2016.

  • 2Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 in journal officiel de la RDC Numéro Spécial.

  • 3MUSILA, C., Crises et conflits en Afrique de l’Ouest, État des connaissances, OCDE, 2002, p.32.

  • 4Modus Operandi, support Pédagogique École d’Eté, Livret 3 : les défaillances de l’État, Université Pédagogique Nationale, Kinshasa, 2014, p.8.

  • 5SERVENT, P., Extension du domaine de la guerre : après les attentats, comment affronter l’avenir, Robert Laffont, Paris, 2016, p.11.

  • 6SERVENT, P., Op. Cit., p.10.

  • 7www.jeuneafrique.com/349363/politique/rd-congo-51morts-nouveau-bilan-massacre-de-civils-est/, consulté le 21 septembre 2016

  • 8GENE Sharp, De la dictature à la démocratie, Un cadre conceptuel pour la libération, disponible sur www.irenees.net/bdf_fiche-analyse-953_fr.html, 2002, consulté le 22/10/2016.

  • 9www.sipri.org/media/blogs/writepeace/war-on-isis, consulté le 23/09/2016.

  • 10Klaus BODEMER, (Sous dir.) Violence, insécurité des citoyens et stratégies pour les combattre, Institut des Amériques (IdA), 2014, p.252.

  • 11Cyril MUSILA, «  Nouveaux conflits violents, nouvelles logiques », in cahiers de Modop, Les attentats de l’année 2015 vus sous l’angle de la transformation de conflit, Paris, 2016, p.33.

  • 12www.radiookapi.net, actualité, consulté le 07 octobre 2016.

  • 13www.rfi.fr/afrique/20150117-rdc-kinsahsa-deputes-examinent-projet-revision-loi-electorale-controverse, consulté le 14 octobre 2016.

  • 14SERVENT, P., Op. Cit

  • 15SERVENT, P., Op. Cit

  • 16VRIGNON B. et CHEK A, Quelle paix pour le nouveau siècle ?, Charles Léopold Mayer, Paris, 2001, p.65.

  • 17MENDE, O.L., Porte-parole du gouvernement lors de son point de presse tenu à Kinshasa, le 22 septembre 2016.

  • 18www.radiookapi.net, actualité, consulté le 20 septembre 2016.

  • 19BOUTROS-BOUTROS-GHALI, « Agenda pour la paix », une diplomatie préventive, ONU, 1992.

  • 20jeuneafrique.com/288897/politique/rdc-front-citoyen-2016-compte empecher-glissement-calendrier-electoral, consulté le 25 septembre 2016.

  • 21Entretien autour des événements du 19 et 20 septembre à Kinshasa avec l’un des jeunes de l’opposition habitant de la commune de Matete, le 23 septembre 2016.

  • 22Voir cours en ligne « Agir sur les conflits » (forum de discussion), 2015.

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