Simone GIOVETTI, Paris, avril 2007
La politique américaine au Moyen-Orient
Cet ouvrage propose une mise en perspective historique de la politique américaine au Moyen-Orient, de sa formulation au XVIIIe siècle, à ses premiers pas concrets au milieu des années 1940, alors que le pétrole était déterminant dans la configuration des relations internationales, et jusqu’à son application contemporaine.
Réf. : Auteur: Barah Mikaïl, Editions IRIS DALLOZ, Paris, 2006
Langues : français
Type de document :
Première Partie
Dans la première partie du livre, l’auteur analyse les motivations qui ont encouragé les Etats-Unis à s’intéresser à la région du Moyen-Orient. Il est souligné en particulier le passage d’une politique isolationniste (doctrine Monroe) à une politique interventionniste (doctrine Truman) suite aux événements de la deuxième guerre mondiale. Si en effet la découverte des gisements pétroliers dans la région à partir des années 40 a attiré toute l’attention de Washington, c’est surtout la guerre froide et la menace soviétique qui ont poussé les Etats-Unis à imposer avec force leur présence dans la région.
Également très important, au niveau stratégique, est le rôle des « sauveurs » dont les Etats-Unis se sentent investis à la fin de la deuxième guerre mondiale, légitimant leur rôle de garant de la sécurité des pays placés sous leur influence.
Deuxième partie
Dans la deuxième partie, l’auteur analyse l’évolution de la stratégie diplomatique américaine dans la région. Franklin Roosevelt est le premier président américain à pressentir l’importance stratégique du Golfe. C’est en effet sous son mandat que les Etats-Unis souscrivent un important accord avec l’Arabie Soudite pour assurer à l’Amérique un approvisionnement continu en pétrole. Roosevelt est également le premier président à s’apercevoir de l’importance électorale d’un lobbying sioniste toujours plus influent aux Etats-Unis. C’est à l’occasion de la troisième guerre arabo-israélienne (1967) que l’appui américain à Israël se concrétise suite à l’alarmisme suscité par un possible alignement de l’Union Soviétique aux côtés des pays arabes.
À partir de 1967 les rapports entre les Etats-Unis et Israël se font de plus en plus étroits. Israël devient un véritable avant-poste américain en territoire arabe. Parallèlement, l’Etat hébreu se voit assuré d’un soutien sans condition de la part de Washington (guerre du Liban 1975-1990).
Les tensions engendrées par la guerre froide augmentent avec l’élection de Reagan à la présidence américaine et l’Afghanistan devient le nouveau théâtre des affrontements entre les deux superpuissances (guerre d’Afghanistan, 1979-1989).
La fin de la guerre froide pousse les Etats-Unis à une nouvelle politique étrangère.
À place d’une politique vouée à s’imposer sur le reste du monde par la force, Washington décide de promouvoir un projet ayant pour ambition de rassembler l’ensemble des Etats de la planète autour d’un projet commun : l’institution de conditions permettant l’établissement d’une paix mondiale. Le succès de cette stratégie est si important qu’au début de la première guerre du golfe (1991) les Etats-Unis peuvent compter sur l’appui d’un grand nombre d’Etats occidentaux.
Pendant les années 1990, les Etats-Unis, même s’ils continuent d’entretenir de très bons rapports avec Israël, sont soucieux de préserver de bonnes relations avec les riches puissances pétrolières, au détriment d’une paix entre Israël et les autres pays de la région.
À l’inverse, l’élection de G.W Bush, en 2001, coïncide avec le complet désintéressement américain du dossier proche-oriental et avec le renforcement des relations avec Israël.
Après le 11 septembre 2001, la lutte antiterroriste américaine devient une véritable politique « étrangère ». En s’appuyant sur l’article 7 de la Charte des Nations Unis, les Etats-unis lancent, en 2003, leur guerre contre l’Iraq avec pour but le renversement de S. Hussein sous prétexte d’une lutte contre le terrorisme (« Iraqi freedom »).
Conclusion
La dernière réflexion de l’auteur porte sur les relations très tendues entre Israël, les Palestiniens et les autres Etats arabes de la région. La faible détermination de l’Etat d’Israël à négocier, et en particulier sa faible volonté à promouvoir des négociations multilatérales ne font qu’exacerber la situation retardant une résolution du conflit. Une pression des Etats-Unis, le seul véritable acteur capable d’agir dans la région actuellement, est une condition essentielle pour conduire les parties en conflit à la paix.
Commentaire
Cet ouvrage qui retrace avec intelligence et précision la progressive montée des Etats-Unis au rang de super puissance mondiale au cours de l’histoire nous montre la centralité de la région moyen-orientale dans l’échiquier international et diplomatique. L’analyse de l’auteur laisse peu de place aux espoirs de paix car au final tout nous ramène à une question d’intérêts économiques, politiques et géostratégiques.
Il ne s’agit pas ici d’un ouvrage de paix, mais plutôt d’une tentative de dévoiler les enjeux qui se cachent derrière un conflit à la fois politique, identitaire et parfois religieux entre les Puissances du nord et les États du monde arabe.
Et voilà que les événements récents (la guerre civile en Iraq, la deuxième guerre d’Israël contre le Liban, le conflit en Afghanistan, la crise iranienne et la poursuite de l’occupation israélienne des Territoires occupés) redeviennent, comme dans une sorte de cyclicité prévisible, centraux dans la poursuite de la stabilité et de la paix. Il s’ouvre donc une question à laquelle nous pourrons difficilement trouver une réponse de la part des acteurs traditionnels engagés: De quelle paix s’agit t’il? et Pourquoi vouloir la paix dans cette région ?. Durant de longues années, le maintien du « statu quo » a été l’objectif affiché de la politique américaine au Proche-Orient. Même aujourd’hui, par exemple, les faibles tentatives de rapprochement entre la Syrie et l’Etat d’Israël semblent êtres bloqués par les intérêts américains dans la région. Les Etats-unis ne sont vraisemblablement pas prêts à reconnaître la Syrie comme un partenaire fiable et cela parce que cet Etat ne défend pas la même vision du Proche-orient telle qu’elle a été conçue par l’administration Bush. L’échec américain en Iraq, la montée en puissance de l’Iran et le Liban en pleine crise interne après le conflit de l’été 2006 n’encouragent pas les Etats-Unis à un véritable engagement pour la paix qui demanderait à Israël des compromis importants. Une fois encore, Israël se révèle être une sorte d’avant-poste américain en cas de crise. La paix avec les Palestiniens n’étant pas prioritaire, Israël peut poursuivre sa politique d’occupation et tout cela en échange d’un soutien militaire et logistique dont les Etats-Unis ont aujourd’hui plus que jamais besoin.
Les Etats-Unis ne pourront atteindre leurs objectifs au Moyen-Orient s’ils ne traitent pas le problème du conflit israélopalestinien et celui de l’instabilité régionale. Les Etats-Unis doivent s’engager à nouveau et de manière ferme dans la voie d’une paix entre Arabes et Israéliens sur tous les fronts : Liban, Syrie et, en ce qui concerne Israël et la Palestine, respecter l’engagement pris en 2002 en faveur de la solution de deux Etats. Quant à la négociation israélo-palestinienne elle ne pourra que porter sur les dossiers centraux du conflit : les frontières, les colonies, Jérusalem, et également le droit au retour des réfugiés.