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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Paris, juin 2007

Colloque international « Eau et santé ». Bienfaits contestés : Paludisme et irrigation, des liens complexes.

De nombreux pays africains ont misé sur l’irrigation pour accroître la production agricole et assurer une meilleure sécurité alimentaire aux populations. Cependant, ces hydro-aménagements, souvent synonymes de risques sanitaires, n’ont pas toujours atteints leurs objectifs. Diagnostic et recommandations de chercheurs au Burkina Faso, à l’occasion d’un colloque international consacré à l’irrigation et la santé en Afrique.

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Réf. : -1. Sciences au sud, n° 11, septembre - octobre 2001, -2. J. Ruffié et J-C. Sournia, « Les épidémies dans l’histoire de l’homme », Paris, Flammarion, 1984.

En Afrique, depuis trente ans, la production agricole vivrière s’accroît de 2 % par an et la population de 3 % (Source FAO). Pour corriger ce déséquilibre à l’origine de graves et récurrentes pénuries alimentaires, on a multiplié les barrages et les systèmes d’irrigation. Mais, 40 % de la population continue à vivre dans l’incertitude alimentaire.

Au palmarès des maladies liées à l’eau en Afrique, le paludisme occupe de loin la première place par le nombre de victimes. Aux abords des petites retenues d’eau ou des grands barrages, dans la végétation ou les cultures alentour, les moustiques anophèles - vecteurs du paludisme - prolifèrent. Une étude menée en Côte d’Ivoire est particulièrement éclairante : au nord du pays, dans les bas-fonds irrigués où les riziculteurs pratiquent deux récoltes par an, le nombre d’anophèle gambiae capturés est cinq fois plus important que dans les bas-fonds non aménagés où dominent les cultures vivrières. « Cet accroissement spectaculaire signifie-t-il pour autant une augmentation des cas de paludisme ? », se demande un parasitologue. La réponse est clairement non ! Malgré les hautes densités vectorielles (de moustiques), le taux d’anophèles infectés est faible. La transmission et l’incidence des accès palustres sont quasiment les mêmes, que les villages pratiquent ou non la riziculture irriguée.

Ces résultats, a priori surprenants, soulignent la complexité des liens entre hydro–aménagements et paludisme. Pour bien les mesurer, il faut tenir d’abord compte de la situation épidémiologique préexistante : dans les régions comme le nord de la Côte d’Ivoire, où l’endémie est stable et la transmission permanente, la création de retenue d’eau n’entraîne généralement pas une augmentation des cas de paludisme, car la population est relativement immunisée contre le parasite. En revanche, là où la transmission est irrégulière et n’assure donc pas une immunité suffisante, elles peuvent être à l’origine d’une morbidité et d’une mortalité accrues, comme cela a été observé au Burundi ou sur les Hauts Plateaux malgaches.

Si les hydro–aménagements ne sont pas toujours la cause directe d’épidémies, en revanche, ils peuvent générer des conditions de vie qui fragilisent les populations. On montre qu’avec deux cultures annuelles en comparaison d’une seule dans les bas-fonds irrigués, les fièvres palustres sont, malgré une transmission comparable, plus fréquentes, tout particulièrement chez les enfants. L’intensification de la riziculture favorisée par l’irrigation, entraîne un surcroît de travail pour les femmes qui disposent alors de moins de temps à consacrer aux soins des enfants. Par ailleurs, elles sont souvent moins autonomes économiquement que celles dont les familles pratiquent la riziculture irriguée. Or, les études mettent en évidence que les femmes ayant une certaine indépendance financière consacrent, plus que les hommes, leurs ressources à l’éducation et à la santé de leurs enfants.

« A la question de savoir si irrigation et paludisme vont de pair, il n’y a pas de réponse toute faite conclut un chercheur de l’IRD. Pour bien analyser les risques associés aux aménagements hydrauliques, il importe d’élargir les recherches et de prendre en considération tous les éléments qui influencent la santé dans son ensemble : densité des vecteurs, statut immunitaire des populations, disponibilités alimentaires, équilibre nutritionnel, représentations de la maladie et itinéraires thérapeutiques, économie de la santé et de l’alimentation… Sans oublier un facteur primordial : le rôle joué par les femmes au sein des familles et des villages ».

Commentaire

Pour qu’en Afrique règne la paix et pour éloigner le spectre des conflits ethniques, religieux… il importe que les gens mangent à leur faim et ne soient pas fragilisés par la maladie. Pour que l’Afrique garde ses enfants et pour qu’ils n’essaient pas de traverser les mers sur de frêles esquifs pour chercher un bien-être illusoire ailleurs, il importe qu’une vie digne leur soit assurée. Souvent, c’est par l’agriculture que ces objectifs sont atteints. Or, l’agriculture exige de l’eau et les retenues d’eau (barrages, barrages collinaires, mares et marigots) présentent des risques d’anophélisme. Le paludisme coûte deux millions de morts par an au Continent Noir. L’incidence de la maladie sur l’économie est énorme. D’après l’OMS, 38 % du PNB partirait en fumée du fait de la morbidité et de la mortalité.

Pour assurer la paix dans le monde et pour alléger les souffrances de l’Afrique, ceux qui ont les moyens et le savoir doivent consentir à aider le continent notamment lors de l’édification de ces retenues d’eau. Le paludisme se rencontrait il y a un siècle en Corse ; et en Italie (Latium et Sicile), il n’a disparu que depuis la Deuxième Guerre Mondiale. L’autre nom du paludisme n’est-il pas italien-malaria ? La maladie se rencontrait aussi dans les Balkans.

Cette maladie hydrique très complexe comme le montre le dernier paragraphe du texte - mais au sujet de laquelle médecins et scientifiques connaissent tout - nécessite une mobilisation mondiale, comme on le voit pour le cancer ou le sida. Il s’agit d’une question d’humanité d’abord, de paix ensuite pour éviter émigration, guerres et occupation des territoires d’autrui.

A cet égard, ce texte montre que les femmes sont des auxiliaires précieuses pour la paix dans le monde dans la mesure où elles assurent soins, éducation et fourniture d’eau aux enfants d’abord et à la famille ensuite.