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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Fiche d’expérience Dossier : Les Organisations Non-Violentes en France

Guillaume Gamblin, Paris, janvier 2007

Equipes de paix dans les Balkans (EpB) - des acteurs multiples pour une action commune

EpB, « Equipes de Paix dans les Balkans » est une ONG française qui intervient actuellement à Mitrovica, au Kosovo, afin de faciliter le dialogue entre les différentes communautés et tenter de faire baisser le niveau de violence, dans un contexte de post-conflit et de tensions inter-communautaires persistantes.

Mots clefs : Théorie de la non-violence | Education à la gestion non-violente des conflits | Organisation non-violente | Former de nouveaux acteurs de paix | Soutenir l'organisation de sociétés civiles locales | Apprendre une culture de paix | Promouvoir une culture de paix | Eduquer à la prévention des conflits | France | Ex-yougoslavie | Les Balkans | Kosovo

I. Les volontaires

Les volontaires constituent la face la plus visible de l’action d’EpB, ils en représentent en quelque sorte l’aboutissement pratique, mais il est essentiel de relier leur action au réseau d’acteurs qui permet et garantit celle-ci.

A. Recrutement et formation

EpB fait appel à des volontaires recrutés sur des critères de motivation ainsi que de capacités physiques, émotionnelles, intellectuelles et linguistiques. Une expérience d’intervention civile, ou de volontariat dans la région des Balkans est également bienvenue. Deux conditions sont essentielles à remplir avant de partir en mission au Kosovo avec EpB : d’une part suivre la formation à l’Intervention civile de paix organisée en France par le Comité ICP, et d’autre part suivre une session de « Préparation au départ » avec le SCD (Service Coopération et Développement).

Cette première formation en particulier est jugée essentielle à la préparation des futurs volontaires ; elle est organisée chaque année et est partagée en trois modules d’une semaine qui permettent d’acquérir une meilleure connaissance de soi, des capacités à faire face au conflit, aux violences et aux situations de crise, des connaissances théoriques concernant l’intervention civile de paix, des savoir-faire en médiation et en gestion non-violente des conflits, et apportent une éclairage pratique sur le déroulement d’une mission ICP. Cette formation implique par ailleurs une réflexion approfondie de chaque stagiaire sur ses motivations au départ.

Des entretiens ont également lieu avec les animateurs de l’association pour vérifier la motivation et la capacité des volontaires à effectuer les missions demandées. Un effort d’investissement personnel dans l’association et de documentation est demandé avant le départ.

B. Les missions

Celles-ci sont élaborées à chaque fois en fonction du contexte et des besoins locaux, en constante évolution, en tenant compte des ressources propres des volontaires. Elles sont censées ne pas avoir une durée inférieure à six mois, sauf exception. Bien que le nom de l’association fasse référence à la notion d’« équipes », les deux premières volontaires envoyées sur place ont souvent travaillé « seules » en tant que membres d’EpB, bien qu’en étroite relation avec des partenaires locaux et internationaux, comme il sera vu plus loin. Ce n’est que depuis le Printemps 2003 qu’on peut réellement parler d’une équipe – restreinte (3 personnes) - à Mitrovica.

Les volontaires sont reçus dans des structures et par des partenaires « amis » qui les aident à s’implanter sur place, ils sont si possible orientés à leur arrivée par les autres volontaires d’EpB encore présents, afin d’assurer un suivi et un roulement cohérents. Ils ont droit à des congés ainsi qu’à des défraiements, et travaillent dans le cadre d’une convention en lien avec le SCD. Ils acceptent un code éthique de conduite et d’action. La vie sur place se déroule dans des conditions assez précaires, liées aux conditions locales – coupures d’eau et d’électricité quotidiennes - et dans un espace très mesuré (pour le logement et les bureaux), dans des locaux communs avec Sport sans Frontière. La contrepartie positive de ces conditions est une grande convivialité entre volontaires internationaux divers, et une meilleure synergie et coopération entre les actions de ces différents volontaires.

Des liens constants sont entretenus avec l’équipe d’EpB en France, par la communication par Internet, l’envoi de rapports mensuels, ou encore grâce aux voyages effectués par des membres d’EpB pour suivre et étudier la situation (la dernière mission de suivi remonte à mai 2003, la prochaine est programmée en novembre 2003). Le Conseil d’Administration d’EpB a souhaité que les volontaires gardent une marge de manœuvre et d’initiative dans l’accomplissement de leur mission.

II. Au Kosovo : coopérer pour promouvoir la coopération

EpB n’est pas le seul acteur impliqué au Kosovo sur le terrain de la reconstruction du lien intercommunautaire et de la paix : l’association travaille au sein d’une multiplicité d’acteurs tant locaux qu’internationaux. Les partenariats actuels sont issus du travail qui a été effectué par les Balkan Peace Team durant sept ans ainsi que des nombreux voyages effectués dans les Balkans par des membres-fondateurs d’EpB depuis 1993.

Parmi les partenaires locaux des Équipes de paix, on peut relever l’association Mingos qui, en tant que lieu de coordination de nombreuses ONG de Mitrovica, a joué un rôle central pour EpB. De nombreuses associations et organisations de défense des droits humains ont été rencontrées et consultées, ainsi que des partis politiques divers, des organisations de femmes, de jeunesse, confessionnelles, des médias,…Des liens de confiance durables ont parfois été établis avec de personnes membres de ces associations, qui constituent à leur tour des appuis et des soutiens à l’action d’EpB sur place. Il faut noter qu’un équilibre doit être nécessairement entretenu dans le partenariat, entre les ONG des deux communautés serbe et albanaise, tant le climat est encore tendu entre celles-ci. Des relations parfois soutenues sont également entretenues avec les collectivités et les administrations locales : municipalités, bibliothèques, centres culturels, jeunesse et sports, écoles… Aujourd’hui, le partenaire local principal d’EpB est l’Agence de la Démocratie Locale du Kosovo (ADL), structure initiée par le Conseil de l’Europe. Le délégué de l’ADL du Kosovo est implanté à Gjilan, c’est un Français natif d’Alsace, Stève Duchêne, co-fondateur de l’association Kosovo-Ensemble où se retrouvent de nombreux membres du MAN.

En ce qui concerne les organisations internationales, EpB travaille en partenariat avec Nansen Dialogue et une Association pour la paix italienne, acteurs impliqués dans une optique proche de la sienne, ainsi qu’avec des partenaires plus « lourds » tels que Caritas Mitrovica (émanation de Caritas France). Une coopération et des rencontres sont établies également avec les institutions internationales présentes sur le terrain : Bureau de Liaison de la France, UMNIK, KFOR, OSCE, etc…

Une réelle dynamique de coopération est mise en route entre ces organisations diverses, dans le but de renforcer la reconstruction, l’autonomie politique et la capacité à coopérer des différentes communautés présentes au Kosovo.

III. En France : orientation de l’action, soutien des volontaires et partenariats

A. EpB : une équipe et un secrétariat

EpB est une association loi 1901 créée fin 1999, indépendante et laïque. Ses membres fondateurs sont issus du MAN, mais aujourd’hui l’association est entièrement indépendante de ce mouvement, avec lequel par ailleurs des liens forts continuent à exister. Mais EpB accueille en son sein toutes personnes désireuses de s’investir dans ses activités. Des personnes issues de mouvements comme l’Arche en sont membres notamment.

L’équipe des membres de l’association est assez limitée, mais ceux-ci sont généralement très actifs en son sein. Un rôle essentiel de suivi et d’orientation de l’action, de soutien des volontaires, de réflexion, et de diffusion des informations est effectué par celle-ci. Une coordinatrice travaille également à la diffusion des informations et au soutien des activités de chacun, ainsi qu’au suivi des partenariats et à la recherche de fonds. Ce travail effectué en France et en Europe est l’aspect le moins visible de l’activité d’EpB, il en constitue pourtant un élément essentiel pour sa pérennité.

B. Des missions fréquentes et des relations suivies

Depuis 10 ans, 15 missions de membres d’EpB ont été réalisées au Kosovo, essentiellement par les membres-fondateurs et animateurs de l’association. Ce sont eux qui sont sur l’initiative de celle-ci et qui assurent sa continuité avec BPT depuis le départ. Ces missions sont l’occasion d’apporter un réconfort aux volontaires et d’assurer le suivi de leurs missions, de se rendre compte de l’évolution de la situation et des projets, ainsi que d’entretenir les contacts avec les nombreux partenaires sur place. De ce fait, les animateurs d’EpB ont acquis une excellente connaissance de la situation des Balkans et du Kosovo, et ont pu établir des liens nombreux et très forts avec des personnes et organisations de cette région (dont l’actuel président Ibrahim Rugova). Leur fidélité leur vaut une large reconnaissance et une notoriété publique dans la région.

Celle-ci est d’autant plus forte qu’EpB, en tant que successeur de BPT international, est l’une des rares organisations internationales à être présente depuis le début des années 90 - avec le Secours Populaire Français et Médecins sans Frontière -, et à apporter un soutien fidèle et continu aux acteurs de la paix au Kosovo. Les partenaires voient avec désolation les ONG se succéder et repartir trop rapidement : en 2003 elles sont parties en masse pour aller sur d’autres terrains tels que l’Irak. La pérennité d’EpB est ainsi ce qui fait sa force et son intérêt auprès de la société kosovare, malgré une certaine fragilité financière – l’essentiel de son financement étant assuré par une seule source au cours des trois premières années…

C. Un réseau de partenaires financiers et pédagogiques.

EpB ne dispose en effet d’aucune ressource propre liée à son activité, basée sur le volontariat. Mieux, l’association doit être en mesure d’assurer le financement de ses volontaires et de ses actions en s’engageant sur leur poursuite à moyen terme. Cette situation financière est un défi permanent, amène l’organisation à se tourner vers des partenaires susceptibles de lui apporter le soutien nécessaire à la réalisation et si possible à la pérennité de ses projets. La fondation France Libertés verse dans ce cadre des subventions annuelles de fonctionnement à EpB, ainsi que la FPH, qui lui apporte un appui essentiel depuis 2000. Non-Violence XXI a apporté une subvention pour soutenir la formation d’un volontaire, et le Service Volontaire Européen a financé en partie les missions de Marie-Eve Rialland et de Sonia Luque. Le Conseil de l‘Europe a également apporté son soutien dans le cadre du programme dit des « Mesures de confiance ». Mais ces partenariats ne font généralement pas l’objet de conventions pluriannuels, ou donnent lieu à des retards de paiement parfois très importants, ce qui met constamment en danger l’équilibre et la survie financière d’EpB et rend très difficile une « planification » de l’action à moyen terme.

A côté de cela, l’organisation compte en France un certain nombre de partenaires, engagés sur le terrain du Kosovo, ou de la non-violence. En particulier, les organisations impliquées dans la formation des volontaires, telles que le comité ICP (avec le MAN et l’IRNC), les Ifman et le Centre de médiation et de formation à la médiation (CMFM). Une présentation du partenariat existant avec l’ensemble des organisations non-violentes françaises a été diffusée par Martine et Pierre Dufour dans un texte intitulé « Contribution à la synergie des mouvements non-violents ».

Enfin, EpB réalise et diffuse depuis 2001 un bulletin bimestriel intitulé « Un pont sur l’Ibar », paraissant également en anglais, afin d’informer sur la situation au Kosovo et de permettre à tous les partenaires et les personnes intéressées de suivre les projets de l’organisation. Ce bulletin est diffusé par e-mail et par courrier, respectivement à 180 et à 140 exemplaires. En juin 2003, EpB et l’association Kosovo-Ensemble du Haut-Rhin ont décidé d’unir leurs efforts dans la rédaction commune du « Pont sur l’Ibar » qui est devenu un 4-pages dont la parution est trimestrielle.

Coordonnées :

  • Adresse : Equipes de Paix dans les Balkans, 114 rue de Vaugirard, 75006 PARIS

  • Tel. : 01 42 84 20 78

  • E-mail : bptkosovo@free.fr

Commentaire

EpB fait appel à des volontaires recrutés sur des critères de motivation ainsi que de capacités physiques, émotionnelles, intellectuelles et linguistiques. Les missions varient selon contexte et des besoins locaux, en tenant compte des ressources propres des volontaires. Son travail au Kosovo dans le domaine de la reconstruction du lien intercommunautaire et de la paix, se met en place grâce à l’interaction d’une multiplicité d’acteurs tant locaux qu’internationaux.

Notes

Sources :

  • Entretiens avec Christian Brunier et Laurence Milliat des 16 et 17 Juin 2003.

  • Numéros du bulletin « Un pont sur l’Ibar ».

  • Rapports de missions au Kosovo de mars 2001, fevrier 2002 et Mai 2003.

  • Compte-rendu du Conseil d’Administration du 2 Juin 2003.

  • Compte-rendus d’activité de Marie-Eve Rialland d’Avril et Mai 2003.

  • Compte-rendus de réunions de travail en Fevrier et en Mai 2003.