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Paris, diciembre 2004

Principe d’humanité

La guerre a ses propres principes et ses propres méthodes, ordonnées logiquement au sein de la stratégie et de la polémologie. Cependant, la guerre n’est pas indépendante de la vie concrète de l’humanité. Tout au contraire, elle engage toujours des personnes, soit pour la conduite des opérations, soit par le biais des relations qu’elle établit avec des groupes et des sociétés ne participant pas au conflit, etc. Un souci d’humanité habite le cœur de toute guerre.

Le mot « humanité » est un terme essentiel du vocabulaire juridique du « droit de guerre ». Si théoriquement, l’expression « principe d’humanité » reste assez floue en raison des différentes interprétations possibles, dans la pratique son utilisation sert à établir le fait que les belligérants ne puissent pas tout faire au nom de la guerre : ils ont des limites précises quant aux moyens employés pour nuire à leurs ennemis.

Ces limites concernent, au moins, quatre domaines :

  • Les armes : l’interdiction de fabriquer, de stocker et d’utiliser des armes chimiques et bactériologiques, des armes incendiaires, des mines et des pièges terrestres.

  • L’utilisation de mesures non nécessaires : interdiction d’employer du poison, de blesser ou de tuer celui qui s’est rendu, de détruire des propriétés ennemies sans nécessité, etc.

  • La protection des victimes de la guerre : toute guerre produit des victimes parmi les populations non combattantes. Les victimes de la guerre représentent l’ensemble des personnes ne participant pas ou plus aux opérations militaires et subissant les conséquences de la violence. Les blessés, les malades, les naufragés, etc. doivent être soignés sans aucune distinction fondée sur la race, l’idéologie, la couleur de la peau, la religion, le sexe, la naissance, la fortune, etc. de même que le personnel civil s’occupant d’eux tels que les médecins, et le personnel religieux, ainsi que les prisonniers de guerre.

  • La protection des civils : il est interdit d’attaquer la population civile et les civils en tant que tels, les attaques doivent uniquement être dirigées contre des objectifs spécifiquement militaires lors de toute opération terrestre, navale ou aérienne. La définition d’"objectif militaire" établie par l’ONU devient importante : il s’agit de biens qui par leur nature, leur emplacement, leur utilisation ou leur destination contribuent effectivement à l’action militaire et dont la destruction partielle ou totale, la capture ou la neutralisation offrent un avantage militaire précis. Tous les autres biens ne rentrant pas dans cette catégorie sont des biens à caractère civil ne devant pas être attaqués. Parmi ces derniers quelques biens sont privilégiés : ceux indispensables à la survie de la population civile, les biens culturels, les lieux de culte, les barrages, les digues, les centrales nucléaires et l’environnement.

Bien que le principe d’humanité et ses déclinaisons pratiques soient acceptés par la majorité des États dans le monde, le problème se pose aujourd’hui avec une certaine gravité car ce qu’on appelle « les nouveaux conflits » ne se produisent plus entre États souverains mais entre des groupes locaux au sein des États ou entre des États et des réseaux internationaux se passant de l’autorité des États et ne reconnaissant pas le principe d’humanité. Dans ce contexte, le problème se pose en termes d’acceptation de principes ainsi qu’en termes de moyens d’assurer leur respect.