, Paris, octobre 2007

Le Nil : conflictualités et initiatives de paix

Gloire à Toi, père de la vie, Dieu secret sorti des ténèbres secrètes, Tu désaltères les troupeaux, Tu abreuves la Terre. Route céleste, tu descends des hauteurs. Ami des blés, par qui croissent les graines. Dieu qui révèle, éclaire nos demeures ! Premiers vers de l’Hymne au Nil, texte du XXème siècle avant J .C., in «  Compagnons du Soleil  », anthologie des grands textes de l’humanité sur les rapports entre l’homme et la Nature, sous la direction de Joseph Ki-Zerbo, Editions La Découverte-UNESCO-FPH, 1992, Paris.

Le Nil est, de part le monde, un fleuve unique et singulier.

Unique pour sa contribution à la civilisation humaine attestée par la grandeur et la splendeur des fascinants vestiges qui nous sont parvenus et la fascination qu’il a exercée de tout temps sur les hommes : pour Ahmed Chawki (1868- 1932) - le prince des poètes de langue arabe – le Nil est «  le Fleuve Eternel  » même si, pour les Egyptiens et les Soudanais subjugués, le Nil n’est jamais un «  fleuve  » mais «  el bahr  », «  la mer  »  !

Singulier par ses crues, ses écosystèmes et ses paysages uniques alliant le désert et les marécages giboyeux, singulier par un immense bassin versant et ses deux branches : le Nil Blanc et le Nil Bleu et un parcours extraordinaire - où la Création a donné libre cours à sa fantaisie - marqué par des cataractes splendides, et qui le voit traverser le lac Victoria, dévaler les montagnes éthiopiennes et baigner les monastères coptes du pays de Couch, se prélasser longuement dans les inextricables marais du Sudd soudanais et visiter, en majesté, les pyramides de Méroé au Soudan, Assouan, Louxor, Dendérah et le Caire en Egypte avant de venir expirer - en suivant les mille et un chemins de son delta - dans les bras de la Grande Bleue, la mer Méditerranée, cette Mare Nostrum qui a enfanté tant de civilisations, de mythes et de héros.

Pour mon ami le regretté Joseph Ki-Zerbo, le grand historien burkinabé de l’Afrique, le Nil serait même à l’origine de l’écriture et de la géométrie plane : comme ses inondations annuelles effaçaient les limites des champs et des propriétés, il a bien fallu fixer sur des feuilles de papyrus la configuration et l’emplacement des biens immobiliers pour restituer à chacun son dû, une fois que le fleuve eut regagné son lit…

Nous en sommes loin aujourd’hui….même si, au cours de l’été 2007, la crue a été particulièrement dévastatrice au Soudan.

Il n’en demeure pas moins que ce fleuve imposant soit toujours à la une de l’actualité aujourd’hui.

Pourquoi  ?

D’abord, parce qu’il donne la vie là où il passe et qu’il est chargé d’une symbolique à nulle autre pareille. Il y a, dans les flots du Nil, plus que de l’eau…

Ensuite, parce qu’il traverse dix Etats profondément marqués par la colonisation et ses ravages et soumis aux jeux géostratégiques violents des puissances, dix Etats que ni les guerres ni les épidémies ni les crises politiques n’ont hélas  ! épargnés au cours des dernières décennies, dix Etats, forts d’une jeunesse exubérante et aspirant à une vie meilleure en dépit des conflits ethniques et religieux suscités par tel ou tel intérêt.

Le Nil est leur planche de salut.

Point de développement, point d’agriculture, point d’eau potable et point d’électricité sans les eaux du dieu Nil.

Autour de ce fleuve unique et singulier, l’Afrique se déchirera-t-elle ou penchera-t-elle plutôt pour la coopération et la solidarité ?

La lecture de ces fiches, nous l’espérons, permettra au lecteur de se forger une opinion.

Auteur du dossier :

  • Larbi BOUGUERRA

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