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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Lauren Dickerson, Etats-Unis, 2005

La démocratisation et la justice sociale : deux défis majeurs pour reconstruire la paix au Nicaragua après la guerre civile des années 1980

Après la signature des accords de Paix entre le gouvernement et l’opposition armée, le Nicaragua rencontre des difficultés énormes pour reconstruire la paix : l’héritage de la violence, l’autoritarisme, la corruption, les inégalités socio-économiques et le manque de politiques sociales adaptées produisent une situation extrêmement compliquée pour la construction de paix.

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Au Nicaragua les accords signés à Sapoa en 1988 constituaient la première étape en direction de la démocratisation du régime politique. Les premières élections libres et démocratiques au Nicaragua depuis des décennies ont permis un changement de régime démocratique et ont favorisé la suite du processus de démocratisation du système politique. Si les élections indiquent bien un potentiel pour la réussite de la démocratie, elles ne la garantissent pas. Trop souvent les organisations investies dans la promotion de la démocratie fêtent l’événement des élections « libres et justes » dans un pays en transition vers la démocratie, mais ils perdent leur concentration sur la réalisation de la réforme démocratique.

Si les élections de 1990 ont apporté un espoir de démocratie en raison de la transmission pacifique du pouvoir, la situation politique restait instable et volatile.

L’installation de structures démocratiques semblait réussir, mais malheureusement, elles développaient les caractéristiques des anciens régimes autoritaires avec, à la tête, un leader autoritaire puissant – un cacique local - et un manque de pouvoir législatif et judiciaire. L’incapacité et le manque d’efforts gouvernementaux de mettre en œuvre une véritable reforme sociale cherchant à répondre aux problèmes concrets de la majorité de la population pendant le nouveau régime de Violeta Barrios de Chamorro contribuait à la continuation de la crise du pays. En 1993, le Nicaragua, traversé par la corruption, la violence et des inégalités sociales extrêmement fortes, a presque éclaté en guerre civile. Les mesures à court terme prises par le président pour éviter la guerre ont mené à une crise constitutionnelle en 1995, qui était seulement partiellement résolue par les élections de 1996. Ce développement d’une démocratie, handicapée par les inégalités socio-économiques des populations, marque bien l’un des problèmes majeurs pour la paix au Nicaragua.

Il est évident que la réforme démocratique implique un engagement sérieux et responsable de la part de toutes les parties impliquées. Mais les conflits, la violence, les divisions politiques et les inégalités sociales rendent le Nicaragua moins favorable aux tendances et aux processus démocratiques. Le pouvoir généralisé d’une petite minorité locale sur la majorité de la population a instauré un système basé sur une double tendance : domination par les puissants (les propriétaires, les militaires, etc.) et peur pour les populations les plus démunies (notamment les paysans).

Le souvenir de la violence sponsorisée pendant les pires années du gouvernement de Somoza, combiné aux conflits interminables entre les sandinistes et les contras institutionnalisaient la violence dans la culture nicaraguayenne et en faisaient la seule façon efficace d’atteindre un but. Le domaine militaire et, avec lui la violence, ont pris une immense ampleur dans les rapports sociaux (entre 1979 et 1985, le budget militaire du Nicaragua a augmenté de 459 %, et pendant les années 1980, les forces armées nicaraguayennes se sont agrandies en passant de 24 000 à 64 000 hommes, une statistique justifiant l’augmentation de l’influence militaire sur la société civile). Pour cette raison, la démilitarisation du pays n’a jamais été complètement mise en œuvre car la crainte permanente de la violence entraîne la peur, donc le besoin de se défendre.

Les fissures sociales entre riches et pauvres soutenues par le sous-développement économique du pays représentent un autre élément largement responsable de la violence actuelle au Nicaragua. Une large portion de cette violence résulte du refus des gouvernements d’améliorer les conditions de vie de ses populations appauvries.

Le manque de soutien aux valeurs démocratiques ainsi que l’inattention aux peuples dénués de la part des gouvernements nicaraguayens renforce la stratification extrême des classes sociales, allant à l’encontre des efforts de démilitarisation du pays et de construction d’une véritable paix sociale.