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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Afrique Région des Grands Lacs, Paris, 2003

Les défis de la paix dans la région africaine des Grands Lacs après les massacres de 1994

Construire une paix à l’image et en réponse à la complexité et à l’imbrication régionale des conflits dans les Grands Lacs.

La région des Grands Lacs est l’une de celle qui a produit le plus grand génocide en Afrique, celui du Rwanda, en 1994. Les effets de cette violence extrême n’en ont pas fini de s’exprimer et de se répercuter dans les pays voisins. Mais l’éclosion de ces atrocités est liée à plusieurs facteurs antérieurs, notamment à une politique qui a été élaborée sur la haine et l’exclusion ethnique.

Elle est aussi celle qui a mis en place, par un jeu complexe d’alliances et de contre-alliance des acteurs, la «  première guerre mondiale africaine  » en République Démocratique du Congo (ex-Zaïre) entre 1996 et 1997, puis depuis 1998 jusqu’à la signature difficile d’accords de paix en plusieurs étapes entre les protagonistes en 2002. A un moment de cette guerre en République Démocratique du Congo, on a compté jusqu’à une douzaine d’Etats impliqués sans compter les groupes armés rebelles et des milices anti-rebelles.

C’est aussi dans cette même région que dure une guerre civile particulièrement atroce et meurtrière depuis 1993 au Burundi. Les violences qui avaient suivi le coup d’Etat de 1993 ont dispersé et appauvri les populations burundaises, semant l’insécurité dans les campagnes jusqu’aux portes de la Bujumbura, la capitale en dépit de nombreux accords de cessez-le-feu.

Rien que ces trois foyers de conflits suffisent à entraîner la présence de plusieurs régions géographiques africaines soit dans les opérations militaires, soit dans la mise en place des forces d’interposititon ou de protection des cessez-le-feu constamment violés. Mais les répercussions directes des violences de ces trois pays sont perceptibles dans toute l’Afrique centrale, orientale et australe au point de déconstruire la géopolitique de la région et d’en construire d’autres, toujours incertaines.

C’est aussi l’une des raisons qui pousse à penser qu’il est utile d’échafauder une construction de la paix capable de prendre en compte à la fois les problèmes locaux, nationaux et surtout régionaux que ces géopolitiques ont contribué à transformer en profondeur. Ainsi la question ethnique par exemple, au cœur du génocide rwandais, s’est déclinée en termes d’opposition entre «  races  » bantoues et non bantoues lorsque des milices et des groupes armés rwandais de tous les bords ont noué des alliances avec ceux du Zaïre. Les Etats aussi se mêlés à ces configurations de la région avec des ambitions, des agendas et des objectifs loin d’être conciliables. C’est ce que j’appelle l’imbrication complexe des conflits. Ce qui fait alors appel à une «  paix complexe  » . Cela représente un ensemble de défis majeurs pour l’avenir non seulement des Grands Lacs, mais aussi des régions qui sont rentrés ou ont été entraînés dans le système des conflits des Grands Lacs.

L’intérêt de ce dossier est de prendre la mesure de ces défis et des efforts qui sont déployés par une multitude d’acteurs pour y répondre. Car il y a d’intenses actions diplomatiques nationales et internationales – souvent avec un fort soutien médiatique avec des résultats pas toujours à la hauteur. Il y a aussi des actions moins connues, moins médiatisées conjuguées par des individus «  anonymes  », des organisations non gouvernementales (ONG), des associations diverses qui retissent les liens brisés entre les communautés, entre les ethnies et surtout entre les pays. Leur travail, taxé souvent de trahison par les tenants des logiques haineuses et fragilisé régulièrement par des violences meurtrières, se veut une lutte pour faire tomber le mur de l’impuissance.

Auteur du dossier :

  • M. Cyril MUSILA, Expert en conflictualité et paix dans la région des Grands Lacs.

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