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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Guatemala, février 2005

Amérique centrale : des inégalités sociales extrêmes menaçant la paix.

Le régime démocratique arrivera-t-il à transformer les rapports sociaux dans le sens du respect des droits de l’homme, de la négociation et de la paix ? Ou au contraire, les inégalités extrêmes produiront-elles de nouveaux conflits capables d’ébranler les acquis de la démocratie ?

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Après des années de guerre civile, des traités de paix ont pu être signés au Nicaragua, au Salvador et au Guatemala. À la fin du XXe siècle, les trois pays étaient sortis de la guerre civile. Non seulement l’Amérique centrale ne s’est pas « colombianisée », mais elle s’est également stabilisée politiquement. Aujourd’hui, non sans difficultés, la démocratisation fait son chemin.

Cependant ces réussites peuvent se voir menacées. Les inégalités sociales extrêmes continuent à se développer, provoquant chez la majorité de la population un sentiment de désillusion, ce qui pourrait faciliter une mobilisation des thématiques sociales permettant de rendre compte de « l’échec de la paix ». En effet, plusieurs Amériques centrales coexistent de façon plus ou moins conflictuelle. Les différences sont très importantes. Par exemple entre le Guatemala et le Honduras, entre le Costa Rica et le Nicaragua. Mais aussi au sein des populations. Par exemple : au niveau politique entre les sandinistes et les libéraux nicaraguayens, au niveau culturel entre les Mayas et les Garifunas guatémaltèques, au niveau économique entre des couches de population ayant un niveau de vie plus que confortable évoluant dans la somptuosité et le luxe et des couches ayant un niveau de vie misérable évoluant dans l’indigence et l’exclusion. C’est ainsi que les indicateurs établis à l’échelle nationale pour chacun des cinq pays masquent d’une façon très efficace des inégalités importantes entre les régions, les couches sociales, le sexe, etc... Les chiffres moyens concernant les revenus, le niveau d’instruction, l’espérance de vie, le taux du chômage, etc. ne permettent pas de déceler l’existence d’une Amérique centrale à plusieurs facettes. Divers groupes peuplant la petite Amérique centrale vivent encore aujourd’hui dans des univers très différents. Masquer cette réalité permet de ne pas repérer les tensions sociales et les conflits potentiels.

Une question peut être posée au sujet des relations entre inégalités extrêmes et démocratie politique : le régime démocratique arrivera-t-il à transformer les rapports sociaux dans le sens du respect des droits de l’homme, de la négociation et de la paix ? Ou au contraire, les inégalités extrêmes produiront-elles de nouveaux conflits capables de s’attaquer aux acquis de la démocratie ? Il n’est pas possible de prédire l’issue de cette contradiction apparente. À moins que ce qui est perçu par le regard occidental comme une contradiction ne le soit pas pour les centraméricains eux-mêmes. Dans ce cas, il est possible que le régime démocratique et les inégalités extrêmes soient alors instaurés dans un cadre politique de cohabitation tranquille.

Sinon, il n’est pas impossible que le recours à un nouveau type de violence, non militaire, diffuse, prenant plusieurs formes : délinquance, violence conjugale, kidnapping, formation de « maras », consommation de drogue, etc. puisse se développer comme compensation symbolique aux insuffisances sociales de la démocratie.