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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Paris, octobre 2006

Un barrage géant menace Hasankeyf, cité turque historique

Les détracteurs de ce futur barrage hydroélectrique dénoncent un « génocide culturel » ainsi que des impacts négatifs sur l’environnement… et l’eau des voisins syrien et irakien.

Mots clefs : | | | | | | | |

Réf. : a) Article de Guillaume Perrier, Le Monde du 09 septembre 2006., b) Lettre de lecteur dans le Monde du 06/10/2006 (page 20)

Type de document : 

Le Tigre, un des fleuves les plus puissants d’Asie mineure, déroule ses méandres au fond d’une vallée du S.E anatolien et arrose la petite bourgade d’Hasankeyf, riche d’un passé dont les traces sont encore là :

  • Des habitations troglodytes habitées des siècles durant ;

  • Un fort romain ;

  • Une mosquée d’époque ayyoubide…

Tous ces vestiges seront engloutis sous l’eau si le barrage dans les cartons depuis 1954 est édifié. Il pourrait être achevé en 2013.

En août 2006, le Premier ministre turc est venu inaugurer les travaux, à Ilisu, en dépit d’une forte mobilisation contre cette réalisation, opposition qui fédère 56 maires de la région, des scientifiques, des ingénieurs et des ONG. L’Etat se propose d’allouer 25 millions d’euros pour la sauvegarde des vestiges archéologiques. Somme insuffisante d’abord disent les opposants, ensuite, 90 % des témoignages du passé sont intégrés au site naturel et rien ne pourra les sauver !

« Ce barrage nous apportera la civilisation », affirme de son côté le maire d’Ilisu, car il n’y a pas de travail ni de téléphone au village. Quant au maire de Hasankeyf, il affirme qu’il s’agit d’« un génocide culturel » et ajoute : « Je ne peux laisser la tombe de mon père sous 40 mètres d’eau ».

En fait, la Turquie vise à augmenter son potentiel hydroélectrique et son approvisionnement en eau.

L’ouvrage mesurera 138 mètres de haut et produira 3 % de l’électricité du pays. Il coûtera 1,2 milliard d’euros.

Mais 55 000 personnes seront déplacées et iront pour la plupart grossir les bidonvilles des grandes métropoles.

L’enjeu environnemental est énorme car les rivières deviendront des lacs artificiels, il y aura de la sédimentation et l’eau sera polluée par les nitrates et les phosphates d’origine agricole.

Aussi grave, en aval du barrage, le fleuve continuera son cours en Syrie et en Irak et la quantité comme la qualité de ses eaux seront sans doute affectées.

Aucun des deux voisins n’a été consulté.

Commentaire

Comme pour tout barrage, on retrouve ici les mêmes récriminations et les mêmes défenses que l’on soit en Inde, en Amérique latine ou en Afrique…

Ce barrage, en réalité, fait partie du « Great Anatolia Project » (GAP) - un projet pharaonique - qui vise à édifier 22 barrages sur le Tigre et l’Euphrate et qui a jeté le trouble entre les trois pays que traversent ces fleuves. Des menaces et démonstrations de force ont déjà été enregistrées par le passé.

Le barrage géant de Hasankeyf aura un impact sur le débit du Tigre à l’entrée de la Syrie et de l’Irak.

Dans les faits, il amputera de 25 % l’eau du Tigre lors de son entrée en Irak.

Le GAP contribue en fait à modifier la situation géopolitique de toute la région et menace ainsi la paix en rendant caducs les accords entre les trois pays.