Simone GIOVETTI, France, octobre 2008
Guerre ou paix
L’auteur met ses connaissances au service d’une analyse prospective du monde à venir. La description des changements et des risques engendrés par la mondialisation souligne, notamment, l’importance de la montée de l’Inde, de la Chine et de la Russie comme nouveaux acteurs et protagonistes des relations internationales.
Réf. : Laurent Cohen-Tanugi, « Guerre ou paix », éditions grasset et fasquelle, paris, 2007.
Langues : français
Type de document :
I. Le nouveau visage de la mondialisation
Dans la première partie, l’auteur nous décrit le nouveau visage de la mondialisation.
La mondialisation est désormais le principal moteur des transformations de la planète, mais ni ses détracteurs, ni ses zélateurs n’avaient entrevu le fait qu’au tournant du XXIe siècle, elle deviendrait porteuse de tensions autant que d’apaisement. Stratégies de puissance, compétition énergétique, réveil des nationalismes et des passions identitaires, guerre, terrorisme… Ce que l’on constate aujourd’hui à tous les niveaux c’est un véritable retour à la puissance sur la scène internationale.
II. La fin de l’ère atlantique
Dans la deuxième partie l’auteur s’interroge sur l’éventualité de la fin de l’ère atlantique sous la pression croissante d’une implosion de l’Occident comme réalité politique et même comme concept de civilisation. Ce que l’on constate aujourd’hui c’est un affaiblissement progressif des Etats-Unis quant à la capacité de définir l’agenda international, tant sur le plan économique que politique : s’agit-il de la fin de la « pax americana » ?
Avec les Etats-Unis c’est aussi le multilatéralisme, ou mieux, le système multilatéral inventé par les Etats-Unis qui marque le pas. La perte de crédibilité du système de l’après guerre sert de plus en plus le refus de la conception occidentale de la démocratie, des droits de l’homme et de l’économie de marché. Le succès des modèles de développement économique chinois, russe ou turc - mêlant économie de marché et étatisme, ouverture internationale et nationalisme économique, démocratie formelle et autoritarisme, capitalisme et islam - constitue un support puissant à la contestation idéologique de l’universalité, voire de la supériorité du modèle politico-économique et des valeurs de l’Occident.
III. Géopolitique de la mondialisation
Dans la troisième partie de l’ouvrage, l’auteur cherche des réponses à la question de savoir à quoi rassemble et rassemblera la nouvelle géopolitique de la mondialisation. La « fin de l’histoire » de Fukuyama ou « le choc des civilisations » de Huntington ? selon l’auteur le lieu de confluence entre ces deux théories est la mondialisation, car la confrontation Est/Ouest comme principe organisateur du monde de l’après-guerre n’a pas d’autre successeur que la mondialisation, qui présente en son sein des effets contradictoires, pacificateurs et belligérants. Est-ce que on assisterait aujourd’hui à un retour des empires ? La Russie de Poutine affiche ouvertement son ambition de restaurer le prestige et la puissance d’en temps, tandis que la Chine demeure une république communiste et une puissance rivale des Etats-Unis et du japon. Le Moyen-Orient reste un espace privilégié où se jouent les intérêts des puissances anciennes et nouvelles, et la question iranienne est loin d’être réglée.
IV. L’Occident à l’épreuve
La quatrième partie est dédiée à la description des défis futurs de l’Occident. L’Europe n’aurait d’autre véritable allié que les Etats-Unis et vice-versa. Ce partenariat transatlantique renouvelé sera indispensable pour faire face à l’avancée des nouvelles puissances non démocratiques. Dans ce partenariat l’Europe ne peut plus se penser exclusivement comme un « marché unique » et un « îlot de paix » dans un monde régi par la Realpolitik. L’Europe doit s’affirmer comme un acteur mondial (ou régional) jouant selon les règles en vigueur du système international, suivant les deux tableaux, du droit et du maintien de la paix et celui de la puissance et des intérêts.
V. Les armes de la paix
Dans la dernière partie du livre l’auteur décrit les risques géopolitiques pesant sur la paix :
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1) La reconquête de la Chine de son rang de puissance ;
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2) La stagnation du monde arabo-musulman et les rivalités internes pour la domination du Moyen-Orient ;
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3) La compétition entre puissances (anciennes et nouvelles) pour le contrôle de ressources énergétiques.
Entre ces trois problématiques, la prolifération nucléaire et le terrorisme sont de « dangereuses allumettes ».
Commentaire
Quelques interrogations majeures : quel sera l’avenir de l’Europe ? Le manque spectaculaire de vision politique à moyen terme sur toutes les questions stratégiques auxquelles nous devrons faire face dans les prochaines décennies laisse craindre le pire. À cette carence s’ajoute l’ambiguïté autour des concepts mêmes d’Europe et d’Alliance atlantique. Comment l’Union européenne peut-elle espérer de survivre durablement si les européens ne sont pas prêts à lui confier des vrais pouvoirs ?
Trois nouveaux pôles s’affirment et s’imposent avec force sur la scène internationale : la Russie, l’Inde et la Chine. Ces trois acteurs ont déjà largement montré leur capacité à nuire aux intérêts vitaux de l’Europe et des citoyens européens, comment l’Europe peut-elle alors poursuivre ses missions originaires de « pacifisme », « multilatéralisme », « gouvernance par le droit » sans prendre le risque de tout simplement disparaître ?
Nous sommes face à un enjeu d’ordre planétaire : avouer les risques des nouvelles guerres, voire d’un troisième conflit qui sera étendu à l’échelle mondiale. Si les conflictualités semblent aujourd’hui avoir changé de nature - terrorisme, guerres civiles, acteurs non étatiques - l’avenir est porteur de nouvelles menaces et « de la certitude de bouleversements géopolitiques de grande ampleur ». De quels outils et de quels arguments disposent aujourd’hui les acteurs de paix alors que la mondialisation économique libérale - qui semble être une des garanties de la paix mondiale - cède le pas à une de plus dangereuse crise à tous les niveaux ?