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, Yaoundé, November 2011

La stratégie du bananier…

Ou l’histoire du bananier et du cocotier, par Cyril Musila.

« L’Histoire du bananier et du cocotier m’a été racontée par mon premier patron à l’OCDE, un béninois. Il m’a dit ceci :

  • Vous venez du Congo : vous devez connaître les zones forestières ?

  • Oui, bien sûr…

  • Est-ce que vous connaissez le bananier ?

  • Oui, bien sûr…

  • Est-ce que vous connaissez le cocotier ?

  • Oui tout à fait…

  • Quelles sont les stratégies de ces deux plantes ?

Bonne question… je commence à patauger, à expliquer…

Il me coupe et me dit :

  • Ce sont des arbres fruitiers mais chacun a sa propre stratégie : le cocotier c’est un arbre qui pousse qui pousse qui pousse qui va très haut ; et, en général, qui domine par sa hauteur les autres plantes. Donc, quand on monte dessus on peut voir d’en haut tout ce qui est autour. Mais, vous savez, il est très fragile. A la moindre tempête, il est exposé et en général il ne résiste pas, il s’écroule.

  • Maintenant, si vous observez le bananier, c’est une plante fragile, il est mou, mais il a une stratégie de résistance inimaginable. Dès que vous plantez un bananier quelque part, très vite d’autres bananiers poussent à côté et avant que le premier bananier n’arrive à maturité, il est cerné par une série d’autres bananiers ; à la première tempête il ne tombera pas, parce que les autres petits bananiers qui sont issus de ses racines lui servent d’appui et finalement il ne tombera jamais.

Voilà, c’est un peu ce qui se passe en Afrique : vous avez des dirigeants qui sont éternels, ils montent, ils montent, ils tiennent le pouvoir en permanence, pendant trente ans on ne voit qu’eux, ils dominent etc mais le jour où ils tombent, mais alors ils tombent, ils tombent bien, de sorte que même leurs propres racines ne peuvent pas les aider à se relever. Votre Mobutu par exemple, il a tenu pendant 30 ans, tout seul, il a tout dominé, jusqu’au jour où il est tombé et on en a même plus parlé, d’ailleurs on ne sait même pas où est sa tombe.

Ce que j’aimerais bien c’est que, en travaillant, vous adoptiez cette stratégie du bananier : c’est-à-dire que lorsque que vous avez réussi, vous devez penser qu’immédiatement vous devez faire un petit, puis un deuxième, un troisième, un quatrième qui constituent autour de vous une haie de protection et avec lesquels vous avez des choses communes. De sorte que le jour où la tempête passe, les petits qui vous entourent vous soutiennent, quel que soit le sens du vent et vous ne tomberez pas tout de suite. Et vous verrez que vous tiendrez longtemps.

Concrètement ça veut dire quoi ? Vous, vous m’intéressez parce que vous savez des choses sur l’Afrique centrale, sur les Grands lacs que je ne connais pas. Or, en tant que responsable à l’OCDE on m’interroge souvent sur cette partie du monde que je ne connais pas. Ma stratégie c’est d’avoir un petit bananier qui m’apporte le soutien dont j’ai besoin. Et donc vous, de votre côté, vous devez faire la même chose : vous ne connaissez rien de l’Afrique australe, et comment vous allez faire pour m’aider ? Parce que je vais aussi vous demander si un problème m’est posé sur l’Afrique australe ! Vous devez avoir quelqu’un qui vous donne ces informations.

En résumé: vous fonctionnez en réseau, vous constituez une force. Ça permet d’être solide, fort dans ce que vous entreprenez. »